Des magistrats et du CFA : Un escamotage annuel moyen de 2 milliards sur les primes
Deux tiers du budget alloué aux primes est subtilisé chaque trimestre. «La probité qu’ils exigent des autres gestionnaires des finances publiques est loin d’être leur tasse de thé», a écrit lundi (12/12) l’hebdomadaire ‘L’Aube’ au sujet des magistrats de l’ordre financier. Il y a qu’à la Cour des comptes du Gabon, un tract dénonce, chiffres à l’appui, de gros détournements. GabonReview examine.
Jeudi dernier de nombreux agents et cadres de la Cour des Comptes du Gabon découvraient, en arrivant dans leur bureau, un tract glissé sous la porte. Moyen pour les individus ou les organisations de faire entendre leurs voix sans s’en remettre aux médias institutionnels et à leurs logiques de sélection, le tract est bien souvent utilisé là où règne l’omerta ou la coercition. C’est visiblement le cas à la Cour des Comptes.
Pas moins de 5 millions de francs CFA subtilisés des primes chaque trimestre
Se définissant comme «L’œil du pauvre» et brisant donc le silence, le document anonyme distribué à la Cour des comptes dénonce et indique, d’entrée de jeu, que les agents de l’ordre financier ne bénéficient «que très partiellement de (leurs) primes». Pourtant, à en croire le tract qui étale «les montants annuels des primes des Agents de la Cour des comptes tirés des balances définitives des comptes de l’Etat», 2,807 milliards de francs CFA ont officiellement été dédiés auxdites primes en 2019. L’année suivante presque le même montant y a été consacré (2,875 milliards) tandis qu’en 2020 le montant affecté aux primes était de 3,166 milliards.
Indiquant que «moins du 1/3 de ces montants (…) est réellement payé», l’auteur ou les auteurs du prospectus anonyme se plaignant d’être payés «à la main comme des manutentionnaires du Port d’Owendo». Il(s) se demande(nt) surtout où va les 2/3 de l’argent restant ? Et d’indexer la «bande organisée de malfrats (qui) se partagent indignement le reliquat de (leurs) primes». Pas de moins de 5 millions de francs CFA seraient subtilisés trimestriellement des primes de chaque magistrat et 3 millions de celles des autres agents. Au regard des fonds alloués aux primes, il y a donc un escamotage de 2 milliards en moyenne chaque année.
Aboghe Ella perpétue le système Ngoulakia
Joints au téléphone ou rencontrés en aparté, de nombreux juges financiers confirment et soutiennent la dénonciation du tract ainsi que les montants y figurant. «Nous appartenons à l’ordre financier. Nous connaissons la comptabilité et ses flux. Celui qui a travaillé sur ce tract a fait du bon boulot», indique un magistrat de la Cour des comptes.
Datant de nombreuses décennies, la pratique s’est littéralement institutionnalisée. Si Gilbert Ngoulakia qui a supervisé la Cour des comptes durant 27 ans bénéficiait d’un blindage ou d’un solide paravent du fait d’appartenir à la famille du président de la République, «on s’étonne que René Aboghe Ella, arrivé à la tête de l’institution en septembre 2021, ait perpétué ce dispositif. N’a-t-il pas eu trop d’argent à la Cenap avec le trucage des élections ?», maugrée un magistrat financier rencontré à la périphérie de l’institution.
Soumis l’autorité de la loi ?
Le 20 octobre dernier, à la faveur d’une audience solennelle ayant présenté 26 magistrats promus dans les Chambres provinciales des comptes, Joseph Mouguiama, Procureur général, rappelait aux nouveaux un postulat «qui ne doit en aucune circonstance, en votre qualité de magistrat, vous paraître superfétatoire, ce rappel selon lequel, vous devez toujours vous savoir soumis l’autorité de la loi». Qui donc et quelle loi soumettra ceux qui, dans la hiérarchie de l’ordre financier, s’accaparent une grande partie des primes de leurs collègues ? Le tract se termine, en tout cas, par une mise en garde : les choses doivent se normaliser durant le mois de décembre courant. Sinon ! Chaud devant !
1 Commentaire
Bjr. Wait and see. Amen.