Fraude douanière à hauteur de 8,3 milliards CFA : l’auteur de l’enquête jeté en prison
Soupçonné d’avoir été l’informateur de Gabonreview pour l’article intitulé «Le casse du siècle : la Douane, l’inspecteur des finances et les 8,3 milliards de fraude», Clément Allogo Minko a été déféré au parquet et pourrait finir à Sans-Famille, le pénitencier de Libreville. Les entreprises listées pour fraude douanière en sont exemptes.
[Aux dernières nouvelles, il a bénéficié d’une mise en liberté provisoire et est sorti du tribunal à 19h12]
Professionnalisme et protection des sources obligent, il aurait été l’informateur de Gabonreview que nous n’en aurions jamais fait mention, ni indiqué les initiales de son identité (AMC). Pourtant, Clément Allogo Minko, inspecteur général des finances à la retraite ayant travaillé à la Direction de la douane et des droits indirects du Gabon, est aux arrêts. Ce jeudi 10 juin, il a été déféré au parquet et pourrait même passer sa première nuit à la prison centrale de Libreville après avoir été auditionne deux jours de suite dans les locaux de la Police judiciaire à Libreville.
Aux dernières nouvelles, il a bénéficié d’une mise en liberté provisoire et est sorti du tribunal à 19h12.
La concussion, un secret professionnel
Suite à une plainte du directeur général des Douanes, il était entendu pour «diffamation et divulgation de secrets professionnels». Comme quoi, la concussion et le vol des deniers publics sont considérés par Boris Admina Atchoughou, le DG des Douanes, comme des secrets professionnels. Comme quoi, voler l’Etat du côté des Douanes est dans l’ordre normal du fonctionnement de cette administration.
Pour un délit visiblement qualifié, Boris Admina Atchoughou a commis trois avocats contre Clément Allogo Minko. Toute chose qui laisse interrogateur. Pourquoi autant d’avocats ? Le DG des Douanes travaille-t-il déjà à sa défense ? Que veut-il démontrer ?
L’alinéa 21 du titre préliminaire de la Constitution gabonaise portant sur les principes et droits fondamentaux ne dispose-t-il pas que «Chaque citoyen a le devoir de défendre la patrie et l’obligation de protéger et de respecter la Constitution, les lois et les règlements de la République» ? Et si l’action de Clément Allogo Minko s’inscrivait dans cette logique ? En tout cas la démarche de Gabonreview s’inscrivait dans cette veine-là. Si tant est-il que ce qui a été publié était faux, on s’attendait plutôt à un démenti formel, à la revendication d’un droit de réponse ou à une plainte pour diffamation. Il n’en a encore rien été à ce jour et l’épais dossier sur le sujet attendra pour être plus amplement étalé sur la place publique.
Aveu du DG plaignant ?
Il y a en effet que le 11 mai dernier Gabonreview publiait un article titré «Le casse du siècle : la Douane, l’inspecteur des finances et les 8,3 milliards de fraude». Le texte indiquant que pas moins de 8,3 milliards de francs CFA avaient été subtilisés et empêchés d’aller dans les poches de l’Etat, par l’entremise de la corruption au sein des Douanes gabonaises ; que l’enquête supervisée par celui qui se révèle aujourd’hui être Clément Allogo Minko, avait identifié 20 structures fautives de fraudes douanières ; que l’actuel DG des douanes avait choisi renvoyer l’enquête aux calendes grecques. En poursuivant cet inspecteur pour divulgation de secrets professionnels, Boris Admina Atchoughou ne commet-il pas un aveu ? Ne reconnait-il pas ainsi les révélations de l’enquête reniée ?
Il reste que c’est grâce à cette plainte qu’on sait désormais que les initiales AMC renvoyaient à Allogo Minko Clément. Il reste aussi que Gabonreview n’a jamais rencontré ce monsieur, que Gabonreview ne peut pas mettre un visage sur son nom, le dossier étant parvenu à la rédaction par d’autres voies et personnes. Il reste enfin que l’action en justice du DG des Douanes cache quelque chose de malsain. Sinon comment comprendre que la vingtaine d’entreprises indexées pour fraudes douanières ne soient nullement inquiétées, mais que soit incarcéré celui qui aurait révélé le pot aux roses ? Des questions en suspens que l’appareil judiciaire risque de ne jamais examiner.
Dans ‘’Babylon System’’, Bob Marley chantait : «them graduatin’ thieves and murderers» (ils donnent des diplômes aux voleurs et assassins). Ça y ressemble étrangement.
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2 Commentaires
Le DG de douanes protège ses amis, et peut être lui-même. Il connaît l’affaire. Si non il n’y a pas d’autre raison. Comment comprendre que le DG des douanes poursuive l’enquêteur en justice et laisse les criminels en liberté ? Quelle est sa motivation, que cache-t-il en réalité ?
La corruption est impossible à combattre aussi longtemps que les Bongo sont au pouvoir entretenant cette mafia qui les profite à ceux premièrement.