Guerre en Ukraine et cours du pétrole : Quid de l’incidence sur l’économie gabonaise ?
La guerre Russie-Ukraine suscite un optimisme de saison pour certaines économies, notamment celles des pays producteurs de pétrole comme le Gabon. Si la flambée actuelle des cours du pétrole se maintient, indique le ministère de l’Économie et de la Relance, les recettes pétrolières vont s’améliorer, impactant positivement les finances publiques du Gabon. Outre la plausibilité d’une loi des finances rectificative, des effets pervers sont tout de même envisageables qui concernent la hausse des taux d’intérêts sur les marchés financiers ou celle du carburant à la pompe.
Toujours en cours, l’invasion de l’Ukraine par la Russie a d’abord alimenté, sur le plan international, des craintes quant à l’approvisionnement en hydrocarbures, notamment en provenance de Russie, deuxième exportateur de pétrole brut au monde. Fin février-début mars, les cours du pétrole sont partis à la hausse après la décision des pays exportateurs membres de l’Opep+ de ne pas augmenter davantage leur production, accentuant ainsi la pression inflationniste dans plusieurs pays. 5ème dans le classement des producteurs pétroliers en Afrique sub-saharienne, le Gabon dont les hypothèses budgétaires tablaient sur un prix autour de 60 dollars peut-il se satisfaire du niveau record atteint par le cours avec un baril ayant atteint 127,98 $ le 8 mars dernier ?
Optimisme et joie de saison
Intitulée «Conjoncture économique mondiale» et publiée le 13 mars 2022, une plaquette du ministère de l’Économie et de la Relance répond à trois FAQ (Frequently Asked Questions = Questions fréquemment posées) sur le sujet. Selon les techniciens du département cornaqué par Nicole Jeanine Lydie Roboty Mbou, «cette flambée des cours du pétrole sur les marchés mondiaux devrait se traduire par une amélioration de la valeur des exportations de pétrole brut à quantités équivalentes. De même, les recettes pétrolières seraient améliorées, impactant positivement nos finances publiques.»
Sans afficher du pessimisme les économistes de la Relance au Gabon se montrent néanmoins prudents, indiquant quelques plausibles effets pervers de cette ‘bonne nouvelle’. En effet, la flambée du cours du pétrole pourrait déboucher, à court terme, sur une «augmentation des prix des produits manufacturés et de certaines consommations intermédiaires. Tout ceci devrait se traduire par un alourdissement de la facture des importations.» Une hypothèse qui commence à se vérifier en grandes surfaces. À Carrefour, dernière-née des enseignes de grande distribution à Libreville, mais aussi Mbolo Casino, de nombreux consommateurs s’étonnent déjà en effet des prix très à la hausse de la plupart des produits.
Effets pervers
Autre effet pervers si la situation venait à perdurer : «la hausse de l’inflation dans les pays développés risque d’entrainer un relèvement des taux d’intérêt (cas des Etats-Unis) et rendre plus chers les emprunts sur les marchés financiers», souligne la note du ministère. Une situation pouvant avoir des répercussions négatives sur l’économie du Gabon, pays ayant assez souvent recours aux emprunts. La situation pourrait rendre ceux-ci plus chers sur les marchés financiers.
Troisième effet pervers possible : la hausse du carburant à la pompe. Selon le ministère de l’Économie et de la Relance, la hausse «des cours du pétrole brut exerce une pression à la hausse sur les prix à la pompe qui pour l’instant n’est pas ressentie par les consommateurs parce que l’Etat fait des efforts en les subventionnant (prix à la pompe) pour préserver le pouvoir d’achat des ménages fragilisé par la crise de la pandémie de la Covid-19». Pour l’instant, l’Etat gabonais paye un peu plus cher la péréquation auprès des marketeurs, pour le maintien à leur niveau actuel des prix de l’essence (605 francs CFA) et du gazole (585 francs CFA). N’empêche, une réflexion est en cours «sur les mécanismes de financement de cette stabilisation». Rien ne garantit donc la stabilité des prix des carburants à la pompe sur le long terme.
Plausible révision de la loi des Finances 2022
Le ministère de l’Économie et de la Relance indique que «pour l’instant, en ce qui nous concerne, les services évaluent l’impact de cette évolution sur les recettes et le moment venu, le Gouvernement procèdera à des arbitrages sur ce qu’il y a lieu de faire.» Autrement dit, si besoin s’en trouve, la situation induite par la modification de l’hypothèse ayant servi de base à l’élaboration de la loi des finances pourrait amener le gouvernement à l’élaboration d’une loi de finances rectificative. L’hypothèse budgétaire passerait de 60 dollars/baril à 110,8 dollars tel que les services du FMI le prévoient actuellement pour le baril de Brent.
En attendant, indique le ministère de l’Économie et de la Relance, «la plus-value ainsi dégagée devrait permettre à l’Etat de mieux faire face à ses engagements, notamment le paiement de la dette publique et le financement des investissements programmés dans le PAT afin de générer une croissance inclusive».
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