Affaire Satram-EGCA : Une première au Gabon dans l’histoire des redressements judiciaires
Les 14 et 16 septembre derniers, le tribunal de première instance de Port-Gentil a rendu un verdict historique et le premier du genre dans une affaire arbitrée par la justice gabonaise : après 36 mois de redressement judiciaire, le syndic judiciaire de Satram-EGCA a annoncé un projet de concordat devant s’étendre sur 7 ans. Une alternative à ovationner lorsqu’on sait que par le passé, les entreprises en redressement judiciaires ont systématiquement été coulées par les syndics administrateurs judiciaires.
L’issue, mi-septembre 2021, de l’affaire Satram-EGCA est résolument inédite. Au terme d’une audience au tribunal de première instance de Port-Gentil, les 16 et 17 septembre derniers, le syndic a en effet annoncé une «alternative historique» contre une option qui aurait été préjudiciable à toutes les parties ( lire «Un concordat pour sortir de la crise» ). Plutôt que la liquidation, après 36 mois de redressement judiciaire, la décision de justice a opté pour un projet de concordat devant s’étendre sur 7 ans. Une première dans un pays où «les entreprises meurent toujours à l’issue des redressements et autres liquidations».
La solution est résolument à féliciter du fait qu’au Gabon les syndics administrateurs judiciaires ont, par le passé et dans la plupart des cas, coulé les entreprises mises en redressement judiciaire. Sans doute, confondent-ils expressément redressement judiciaire et liquidation judiciaire. Cette dernière étant une procédure de cessation de l’activité ou de dissolution d’une entreprise, notamment en cas de faillite, alors que la première consiste, dans le cas où une entreprise est en difficultés financières ou en cessation de paiements, à sauver la structure tant qu’un redressement de l’activité est envisageable.
La pratique, au Gabon notamment, est de passer très vite à la liquidation. On a en mémoire les cas de l’ancien Fonds de développement et d’expansion (Fodex) des PME et PMI, d’Air Gabon ou de la Poste SA. Ces entités ont toutes fait les frais d’une volonté systématique de liquidation. Dans le cas tout récent de la Poste SA, le liquidateur déclarait que «ce que nous essayons de faire, c’est de voir à partir des actifs, dès que la liquidation est prononcée, si on peut réaliser ces actifs, c’est-à-dire vendre les biens immobiliers, si on peut recouvrer les créances, c’est-à-dire ceux qui doivent, remboursent et avec cet argent, nous tentons de rembourser les épargnants». Il s’agit toujours et toujours de rembourser les dettes, jamais de sauver l’entreprise et les nombreux emplois en danger. Et d’emplois il y en a environ 1 500 dans le cas de Satram-EGCA. L’entreprise en comptait d’ailleurs 3 000 à Port-Gentil à ses débuts.
En juillet 2020, Nicaise Edzang Onyane, contrôleur représentant les travailleurs dans la procédure de redressement judiciaire de Satram, déplorait des «ingérences dans l’accomplissement de la procédure de redressement judiciaire entamée depuis le 21 février 2018». Il listait notamment la dépossession à Satram de deux milliards de franc CFA par un ancien procureur de la République près le Tribunal de Libreville, en novembre et décembre 2018 ; les interpellations tous azimuts par la DGR et le B2 des dirigeants et certains des employés Satram, plombant ainsi le bon fonctionnement du redressement judiciaire ; un arrêt rendu par la Cour d’Appel Judiciaire de Port-Gentil en juin 2020, ayant généré des problèmes supplémentaires quant au paiement des salaires. Autant d’actions, entre autres, qui auraient pu précipiter le démantèlement de l’entreprise.
La solution trouvée par l’actuel le syndic judiciaire est, à juste titre fort, appréciée. «C’est une première au Gabon qu’une boite mise en redressement judiciaire survive. La plupart des syndics ont coulé les entreprises et se sont enrichis sur ces procédures», a laissé entendre un observateur, faisant savoir que «dans le cas de Satram, par exemple, on a connu des syndics qui, dès leur arrivée, ont voulu vendre le matériel, au nom de «il faut payer les charges, etc.»». Dans la plupart des cas, «on a toujours voulu démanteler la boite», a-t-il regretté.
Dans le cas de Satram, le directoire de l’entreprise, incarné à Libreville par Saïd Znaki et à l’international par le Dr Mustapha Aziz, président du conseil d’administration (PCA) de l’entreprise, se sont battus bec et ongles, pour éviter que certains syndics ne bradent l’entreprise ainsi qu’ils entendaient le faire pour boucler le dossier au plus vite, liquider l’entreprise et, bien souvent, s’enrichir au passage.
Le combat des directions générales de EGCA et Satram contre les syndics véreux visait à «sauver les activités, les emplois, de créer une nouvelle image auprès des tiers afin de redonner confiance aux partenaires du groupe nouvellement constitué». Le concordat va durer au moins 7 ans. Et même si c’est long, EGCA et Satram ne seront plus vendues du fait de la pression et de la nécessité de payer les créanciers. «Un chapeau est à tirer aux directions des deux entreprises, parce qu’elle se sont opposées, contre vents et marrées, à tous les syndics qui voulaient liquider la structure», a renchérit un autre observateur.
1 Commentaire
C’est vraiment à féliciter. Mais n’oublions pas que les dessous d’EGCA et Satram sont sans fond, car leurs tentacules sont très longue…
Pourquoi ne pas avoir fait ce concordat pour les différentes entreprises Parapublics tels que celles nommées dans vos propres…?