«La différence entre le politicien et l’homme d’Etat est la suivante: le premier pense à la prochaine élection, le second à la prochaine génération», indiquait le théologien et écrivain américain James Freeman Clarke. Se présentant tout simplement comme un citoyen gabonais, un internaute, Edgard Obame-Ndemezock, attire l’attention sur ces deux concepts et en tente une contextualisation à l’approche de la présidentielle gabonaise. Dans quelle catégorie peut donc s’inscrire chacun des 14 candidats retenus par la Cenap ?

© Gabonreview/Shutterstock

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A la veille de l’élection présidentielle dans notre pays, alors que se profile le choix entre des candidats dont un grand nombre justifie d’une réelle et longue expérience dans la conduite des affaires de l’Etat, arrêtons-nous un moment et interrogeons-nous sur ce que le pays est en droit d’attendre d’eux s’ils accèdent à la magistrature suprême, en l’absence d’un vrai débat de fond.
La confrontation espérée des projets demeurant potentielle voire virtuelle, le débat présidentiel actuel semble davantage porter la marque d’une opposition de trajectoire entre les candidats déclarés plus que des clivages d’idées. En tout état de cause, cette carence, certes dommageable, ne doit pas éluder les qualités individuelles que les candidats devront posséder et faire montre pour traverser l’Ogooué qui sépare l’homme politique (qualité présumée acquise par eux) à l’homme d’Etat auquel ils aspirent tous – du moins, nous l’espérons.
L’homme politique est généralement défini comme une personnalité qui s’implique dans la vie politique de son pays par ses idées et par son action. Il s’attache ainsi à agir au quotidien pour ses concitoyens et sur leur environnement. La quête du pouvoir par l’homme politique a donc pour but essentiel de faire triompher les idées auxquelles il croit et de les faire appliquer.
L’homme d’Etat, avant de se révéler, est d’abord un homme politique. C’est l’exercice du pouvoir qui permet à celui-ci de se transformer en homme d’Etat lorsque les qualités ci-après sont dévoilées :
–           Un rapport aux traditions et à l’histoire inscrit dans une vision stratégique pour le pays ;
–           Un sens élevé de l’intérêt et du bien communs ;
–           L’abnégation et la transcendance ;
–           La dignité dans l’exercice de ses fonctions.
Ces qualités peuvent, bien entendu, être mises en exergue dans une autre fonction que la fonction présidentielle mais c’est cette dernière qui est l’objet de notre propos parce que, au Gabon, comme ailleurs, cette fonction est centrale et ne se confond avec aucune autre. Pour être homme d’Etat, le futur élu devra d’abord d’être un bon Président et apôtre du « bon gouvernement » au sens de Pierre Rosanvallon. Nos aspirants à la fonction présidentielle doivent l’envisager et le président sortant doit l’évaluer à l’aune de ce postulat.
A la lumière des expériences décrites par ceux qui ont occupé cette fonction ou des collaborateurs qui ont travaillé à leurs côtés et les ont observé, il est permis de relever quelques fondamentaux sur les aptitudes morales et intellectuelles que requiert l’exercice de la fonction présidentielle et qui font un bon Président ; étant entendu que cette fonction peut également être exercée sans un relief particulier lorsque son titulaire n’est manifestement pas au niveau des obligations ni des prérequis inhérents aux devoirs de sa charge.
Le bon Président est imprégné des réalités de son pays et cette appropriation, il doit la vivre profondément et en avoir pleinement conscience. L’intérêt général est placé au-dessus de ses préoccupations et il doit être capable de décider sans espérer tirer un profit personnel de ses décisions. S’il doit posséder des connaissances sur les questions économiques, sociales et géopolitiques, il doit tout autant être capable de susciter et de pratiquer le consensus avec l’ensemble de la classe politique, voire de la société civile, sur des questions géostratégiques ou d’intérêt supérieur. Il doit faire montre d’une grande écoute et sa capacité de travail doit être éprouvée.
Martelons-le avec force, le futur élu doit intégrer qu’un bon Président devient homme d’Etat lorsque tout son agir politique repose sur la recherche absolue du consensus face à toutes les situations conflictuelles collectives. Il tient, comme à la prunelle de ses yeux, à la volonté de faire vivre et de faire coexister dans la paix ses concitoyens tout en œuvrant à l’essor du pays et en lui ouvrant les portes de l’espérance. Il doit cultiver l’humilité et ne pas paraître dogmatique et dépourvu de tempérance.
Plus que jamais, dans un monde de plus en plus complexe, en sus de la clairvoyance, l’action politique du futur vainqueur de l’élection présidentielle au Gabon devra reposer sur « une éthique humaniste » sachant distinguer l’essentiel de l’accessoire en empruntant les voies du respect, de la tolérance, de la dignité, de la vision et de l’impartialité pour apporter au Gabon plus de prospérité et de rayonnement. Vaste chantier !
Qui en sera capable ? A vous chers lecteurs et/ou électeurs d’en juger.
Edgard Obame-Ndemezock, Citoyen
 

 
GR
 

0 Commentaires

  1. Edgard Félix BOUNGOURES dit :

    je suis d’avis cher homonyme que ta description du prototype du Président de la République est parfaite. il reviendra a chaque citoyen gabonais de s’y référer, non pas dans une approche partisane mais plutôt objective pour faire le bon choix. c’est à ce prix que le pays tout entier basculera dans l’ère du changement…

  2. LEMOABI dit :

    Très bon article qui sort du quotidien insipide que nous lisons sur la politique et les politiciens du Gabon. Je retiens surtout qu’un homme d’Etat pense surtout et d’abord aux générations futures.Cela devrait aller jusqu’au petit fonctionnaire de d’Etat dans l’exercice de ses fonctions.
    Remarques:
    – Quand vous contribuez à la prise du pouvoir par un individu parce qu’il garantira votre place au soleil;
    – Quand vous devenez un homme politique avec des ambitions présidentielles seulement avant trois mois d’une élection présidentielle;
    – Quand vous validez en tant qu’élu du peuple une constition qui fait d’un individu un demi dieu;
    – Quand en 20 ans, vous passez 4 fois de l’oppostion à la majorité et de la majorité à l’opposition;
    – Quand vous donnez de l’argent aux citoyens pour assister aux meetings que vous organisez;
    – Quand vous véhiculez des concepts comme ’’Tout Sauf Fang’’ pour ravivez la pensée ethnique en votre faveur;
    La liste est longue….
    Etes-t-vous un homme d’Etat? Ou alors, devez-vous espérer être et mériter d’être Chef de l’Etat?

  3. Jean Gaspard Ntoutoume Ayi dit :

    Merci à vous Edgard Obame pour cette approche de la question du choix du président de la République.
    A défaut de pouvoir des aujourd’hui dire qui parmi les candidats est plus homme d’Etat qu’un autre, l’expérience des 7 dernières années pourrait dors et déjà permettre d’en éliminer.

  4. LIBOTA WONGO dit :

    Très-bien, Edgard. Ton exposé est intéressant tant sur le fond que sur la forme. Cependant, revenons à l’essentiel et à la réalité pratique de notre pays. Chez nous, on a plus des hommes politiques que des hommes d’État, c’est bien entendu mon triste constat. Les raisons de ce que je dis paraissent multiples. Sans tergiverser, prenons le cas de notre Premier Ministre actuel. On a l’impression qu’il a été nommé juste pour être au contact des populations d’Oyem et du Woleu-Ntem en général et non des populations Gabonaises dans leur ensemble, c’est encore là un constat que je fais entre l’homme politique et l’homme d’État, pour déboucher sur la situation qu’Edgard vient de décrire plus haut. Revenons à l’élection présidentielle et en ma qualité d’électeur, je pense que les hommes politiques sont à foison contrairement aux hommes d’État. Nous savons que pluseurs barons de l’opposition actuel sont des anciens cadres du parti du pouvoir sortant, et sans parti pris, nous connaissons les valeurs que ce système à imprimer sur notre vision commune du monde. Je laisse la latitude à chacun d’en tirer substance.

  5. Franck Ndjimbi dit :

    Merci Edgard Obame pour ce papier. A chacun de faire son introspection…

  6. sven markus dit :

    Au regard de l’ ensemble des candidats déclarés aucun parmi eux ne remplis à la fois les critères d’ Homme d’ Etat et d’ Homme politique à mon goût , on a beaucoup plus à faire à des hommes d’ état mais très peu d’ homme politique . De mon point de vue on devient un « bon Président de la république » soit parce qu’ on a des prédispositions pour exercer une telle fonction soit parce que toute au long de sa carrière politique ou professionnelle on s’ y est préparé .

    • Nkomgane dit :

      Completement a cote de la plaque et vous n’avez rien compris des propos du compatriote. Relisez bien et c’est tout le contraire. De la lecture faite, il y a beaucoup plus d’hommes politiques et je dirai meme politiciens que d’hommes d’état parmi les candidats.

  7. Bikoro dit :

    Bonjour Citoyen Obame-Ndemezock,
    Votre analyse est bien évidemment intéressante. Mais, sans pour autant nuire à la qualité de votre réflexion, il y manquait une autre nuance nécessaire. Notamment celle du « politicien ». Je comprends que vous ayez limité votre réflexion au distinguo « homme politique et homme d’Etat ».
    Tout politicien n’est pas « homme politique », ni « homme d’Etat ».
    Nous dirons que sur les trois « Politicien », »Homme politique », « Homme d’Etat », la qualité de « Politicien » est la qualité la plus basse. Car un « Politicien » désigne quelqu’un que ne vit que des ses responsabilités politiques et qui s’illustre par des « mauvais coups », des « coups bas », des « intrigues ». Le mot « Politicien » possède donc en réalité un sens péjoratif.
    Sinon, très bonne analyse et félicitation!!
    Cordialement

  8. Axelle MBALLA dit :

    Merci Edgard. Une bonne analyse. Une excellente emprunte. Gaspard l’a dit.Dans une posture rétroactive, l’un de ces candidats devrait pas être là. Aucun effet de distanciation avec les préjugés par rapport à l’objet qu’est ce scrutin présidentiel, me direz-vous…oui!
    Mais d’Athènes à Saint Augustin, de Hobbes à Max WEBER, la pertinence théorique de votre thème en est clairement illustrée.
    Excellente visibilité de la question soulevée!
    Chapeau!

  9. Nzela Jean dit :

    Un véritable homme de la situation, il sait faire la parité entre la politique et la republique.

  10. Fridelia dit :

    t l’exercice du pouvoir qui permet à celui-ci de se transformer en homme d’Etat lorsque les qualités ci-après sont dévoilées :
    – Un rapport aux traditions et à l’histoire inscrit dans une vision stratégique pour le pays ;
    – Un sens élevé de l’intérêt et du bien communs ;
    – L’abnégation et la transcendance ;
    – La dignité dans l’exercice de ses fonctions.

  11. Théophile MBORE dit :

    Bonjour cher grand frère Edgard,
    Cette tribune ne m’étonne pas de toi, et t’en remercie car elle participe à nous poser des vraies questions pour choisir, au-delà du futur président, quel type d’Hommes devrions-nous avoir.
    On comprend tous qu’il vaut mieux être un Homme d’État que d’être un simple homme politique. J’ajouterais juste à ton propos que, autant on ne naît pas homme politique, autant on devient un Homme d’État.
    Pour ce faire et en plus des qualités que tu lui as attribuées, un Homme d’État se révèle d’abord à la pratique, mais surtout face à un ou plusieurs défis majeurs à relever, pas pour une partie du pays, mais pour son ensemble.
    Ainsi donc et en parlant de notre beau Gabon :
     Les candidats actuels ont tous la potentialité de se révéler des Hommes d’État (ce que nous souhaitons tous), car il n’y a pas ni un moment pour commencer à l’être, ni une date limite à cet effet.
     Pour voir plus loin, ma question est « Que faisons-nous pour faire émerger une (future) classe politique enclin à devenir des Hommes d’État ? » Ceci peut faire l’objet d’un autre libre-propos…
    Dans tous les cas, merci pour cette tribune qui sort de l’ordinaire, de notre ordinaire…

  12. jean Allogo dit :

    Merci Mr Edgar Obame pour cette analyse assez intéressante mais qui reste globalement dans les généralités(homme politique /homme d’État).
    En effet le gabonais a surtout besoin dans le contexte actuel c’est à dire élection présidentielle qu’on l’ aide à mettre sur chacun des visages des candidats le qualificatif qu’il convient à chacun;et bien sûr rappeler le qualicatif qui correspond le mieux à la gestion de notre pays.
    l’urgence commande qu’on ne puisse plus se cacher derrière des notions et concepts.
    depuis bientôt 50 ans,un individu a décidé de faire admettre et imposer aux gabonais une pensée unique c’est à dire sa pensée surtout quand on sait qu’il y avait auprès de lui des lumières et voilà que l’obscurité s’y établi au Gabon…
    la suite nous la vivons aujourd’hui avec toutes les conséquences terribles.
    Qu’est ce qui fait donc courrir cette famille…

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