Davantage utilisé pour déclencher des avortements clandestins que pour traiter les troubles gastriques, Cytotec devrait être retiré du marché en 2018. Ce produit est bien connu des femmes au Gabon.

Détourné de son usage initial, le Cytotec sera retiré du marché en mars 2018. © GARO/Phanie

 

«Cytotec» serait-il victime du succès de ses contre- indications ? Sans doute. Ce produit ayant acquis ces dernières années une certaine réputation auprès des populations à travers le Gabon et le monde, ne devrait bientôt plus être accessible dans les pharmacies. Le laboratoire Pfizer a récemment décidé d’interrompre sa commercialisation. La date butoir a été fixée au 1er mars 2018. La raison évoquée par la société pharmaceutique américaine : les dangers liés à l’usage illicite que certains patients en font.

Initialement prescrit aux personnes présentant des troubles gastriques, à l’instar des maux de l’estomac, il était désormais de notoriété publique, ici comme ailleurs, que le Cytotec servait pour des interruptions volontaires de grossesses (IVG) et des déclenchements d’accouchement. De nombreuses patientes ne s’intéressaient donc plus au médicament que pour ses contre-indications. Le misoprostol, la molécule active du Cytotec, «peut provoquer de graves complications telles que des avortements, des naissances prématurées ou des malformations du fœtus», lit-on dans la notice accompagnant le produit. Pis, l’utilisation par voie vaginale, alors que ce médicament est indiqué par voie orale, pose un autre problème de santé.

Depuis, le Cytotec est entré dans le langage courant au Gabon comme dans d’autres pays. En 2013, au moment où l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) alertait, en France, des dangers liés à l’usage détourné du produit, Amandine en faisait un titre. A l’époque, la chanteuse gabonaise avait expliqué que sa chanson «Citotec», plutôt que d’être une publicité au profit du médicament comme certains l’avaient pensé, était destiné à la sensibilisation des Gabonaises ayant recours à ce produit pour les avortements.

Il faut dire qu’au Gabon, le Cytotec bénéficie d’une popularité certaine, même si son accès se fait presqu’exclusivement sous le manteau, dans les «pharmacies parterre», ces commerces illégaux de médicaments. Interrogées, une femme sur deux avoue à demi-mot avoir déjà eu personnellement recours au Cytotec pour un avortement. Deux sur trois disent en avoir entendu parler autour d’elles. Klesh M., jeune commerciale, avoue avoir utilisé ce produit il y a quelques années, tout comme elle ne nie pas que son utilisation comporte des dangers. «L’amie d’une de mes sœurs, après avoir avorté grâce au Cytotec a saigné pendant plusieurs jours. J’ai vu d’autres connaissances subir de graves complications, et en les voyant sur leur lit d’hôpital, j’ai compris que j’avais eu beaucoup de chance».

Klesh l’assure, elle ne recommencera plus. Comme elle, beaucoup ne pourront plus profiter de sombres vertus de ce produit. Il sera retiré du marché dans cinq mois. La jeune femme n’est pourtant pas dupe. «Pour le même usage, le Cytotec sera remplacé par un autre produit».

 
GR
 

2 Commentaires

  1. Barbara Strandman dit :

    Bonjour, cet article comporte plusieurs erreurs: l’arrêt de commercialisation concerne uniquement la France, j’ai vérifié soigneusement: aucune information de Ferring sur un retrait quelconque pour l’Afrique d’autant que le cytotec fait parti de la liste des médicaments essentiels de l’OMS (entre autre pour les services rendus pour le traitement de l’hémorragie du post-partum et l’accès à un avortement médicamenteux dans les zones où celui-ci est criminalisé). Les réserves liées au misoprostol (le principe actif du cytotec) sont en grande partie concentrées sur son usage dans le déclenchement des naissances. D’autre part l’usage illicite en Europe n’est pas du fait des femmes mais des médecins: pour l’IVG il y’a des alternatives au misoprostol avec autorisation de mise sur le marché (ce qui permet une information des femmes, ex Gymiso et MisoONe), pour le déclenchement des naissances il y a aussi des alternatives (Propress…). De surcroit il est question de peut-être autoriser une préparation à base de cette molécule au dosage de 25 mcg (Angusta déjà commercialisé en Scandinavie). Cordialement, Barbara Strandman

  2. diogene dit :

    Encore une fois, interdire ne sert qu’à faire des dégâts maximum.

    Il faut légiférer sur l’interruption volontaire de grossesse IVG et aussi rendre accessible les moyens de contraceptions : pilules contraceptives, pilules du lendemain et pas seulement les préservatifs dont les prix devraient être abaissés et les distributions gratuites aux plus jeunes doivent être promues et multipliées.
    Mais pas par des associations bidons qui n’ont pour objectif que l’absorption de subventions internationales pour se remplir les poches, comme c’est si souvent le cas…

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