Xavier fait partie de ces experts très discrets qui parcourent l’Afrique pour assister les entreprises dans leur déploiement numérique. Sauf que lui est gabonais, ce qui est assez rare dans ces métiers jusqu’alors dévolus aux occidentaux.

Gabonreview.com - Internet mobile en Afrique - © D.R.

 

“Je suis le petit canard noir au milieu d’un troupeau d’oies blanches,” dit-il avec un sourire. “En fait, c’est très rare encore de rencontrer des ingénieurs informatiques qui ont aussi de solides bases marketing et graphiques. On trouve ça en Europe, aux États Unis, un peu en Asie, mais en Afrique, les informaticiens sont restés des encodeurs. De très bons techniciens parfois, mais totalement hermétiques à l’esthétique, au business en général et à tout ce qui s’éloigne un tant soit peu de leur spécialité. Notre continent a encore beaucoup de mal avec la culture générale.”

GabonReview : Vous travaillez dans un domaine qui est encore très peu développé en Afrique. Pourtant, vous êtes sans arrêt en voyage, vous nous demandez une totale discrétion sur votre identité, c’est tout juste si vous acceptez de dire que vous êtes gabonais… Vous semblez débordé.

Xavier : C’est vrai et faux à la fois. C’est vrai que dans la plupart des pays où je me rends, Internet fait encore figure de gadget et de technologie d’avant-garde. C’est faux parce que les entreprises qui ont pris le train en marche sont au même niveau d’intégration numérique que leurs consœurs occidentales et en tirent beaucoup plus de profits. Et si je désire rester discrets sur mon identité c’est que je travaille pour des clients qui ne veulent pas que leurs projets s’ébruitent avant terme du fait de ma présence. C’est important de surprendre la concurrence. Et puis je suis un technicien, pas un people.

Gabonreview : Vous affirmez qu’Internet est une aubaine pour l’Afrique, mais cela ne se voit pas! L’essentiel, pour ne pas dire tout l’argent généré par Internet l’est dans les pays riches.

Xavier : On ne fait pas les mêmes choses avec Internet en Afrique et en Europe par exemple. D’abord parce que les besoins sont très différents. Du point de vue d’une PME, il est évident qu’on ne va pas vendre sur Internet en Afrique. Le grand public n’est pas bancarisé, les cartes de paiement à peine existantes et réservées à un très petit nombre. Mais Internet ne sert pas qu’à vendre en ligne. C’est dans le cadre du B to B qu’il est terriblement puissant. En Europe, avoir son site est parfaitement banal. Ici non. Pourtant, lorsque vous rencontrez un chef d’entreprise et que vous lui laissez votre carte de visite, et si l’adresse de votre site y est en bonne place, il va immédiatement aller regarder ce qu’il y a dessus. Ce sera la première idée qu’il se fera de votre business, de votre sérieux, de votre compétence. Comme la plupart des sites Internet sont lamentables, si le votre est clair, qu’on y circule simplement, que vos produits et services sont mis en valeur, vous venez à coup sûr de transformer un prospect en lead, c’est à dire quelqu’un qui est prêt à vous intégrer comme fournisseur. Après, bien sûr, c’est à vous d’être efficace et d’offrir réellement le service que vous promettez sur votre site. Mais pour un coût dérisoire, vous disposez d’un outil qui détrône à la fois les plaquettes commerciales, les coûteuses réunions d’information, les stands sur les salons, et plus généralement, tous les documents imprimés qu’il fallait distribuer auparavant.

Attention, ça ne vous dispense pas d’équipe commerciale. Pour qu’un client visite votre site, il faut d’abord qu’il en ait envie. Ça c’est le boulot du commercial. Ça ne vous dispense pas non plus de travailler. Vous perdrez immédiatement ce client si vous ne répondez pas dans des délais rapides à ses demandes, si vous ne faites pas le travail correctement ou si vous n’êtes pas assez compétent dans votre domaine. Mais disposer d’un site esthétique, adapté à votre activité, riche en information et bien organisé vous permet d’imposer immédiatement une image positive et moderne. Et bien cela, en Afrique, c’est un atout majeur.

GabonReview : Développer et maintenir son site à niveau, cela coûte cher. N’est-ce pas réservé aux grosses entreprises ?

Xavier : Et bien non justement. Allez jeter un œil sur les sites des entreprises du Gabon. Vous y trouverez une majorité qui ne fonctionnent pas, ou alors très mal et très lentement. Et puis ils sont terriblement laids et vieillots ! Du côté des filiales d’entreprises multinationales, il y a parfois une page dédiée au pays, avec au mieux quelques contacts, en espérant qu’ils sont à jour. Tout le reste n’a aucune utilité ici.  Un site pour une PME, cela coûte aujourd’hui le prix d’un petit millier de plaquettes de présentation imprimées. Sans doute moins vu les tarifs d’impression pratiqués au Gabon. Cela veut dire qu’en quelques mois votre site est amorti. Ensuite, cela dépend de votre activité. Mais il est bien rare qu’une PME ait à présenter de nouveaux produits toutes les semaines.

Ce qui a fondamentalement changé, c’est la technologie. Auparavant, développer un site était une opération très technique, très spécialisée, nécessitant de nombreux intervenant coûteux. Aujourd’hui, c’est l’affaire de quelques jours pour une équipe réduite. Et la plupart du temps, il est livré clé en main avec la possibilité pour le chef d’entreprise lui-même de faire la plupart des mises à jour nécessaire. Donc, tout au plus, cela demande une refonte tous les 2 ou 3 ans. Mais pour cela, il faut évidemment faire appel à des prestataires modernes et compétents. Et ils sont encore très rares sur le continent. Pas seulement au Gabon.

GabonReview : Et vous faites partie de ces prestataires ?

Xavier : Non, moi je suis spécialisé dans un domaine précis qui est la veille concurrentielle et le déploiement de stratégies numériques. Et bien entendu, je suis hors de prix. Mais cela débouche inéluctablement sur le développement de sites pour les partenaires de mes clients. Je ne vais pas m’étendre sur mes secrets de fabrication, mais une des stratégies de développement pour une PME, c’est de promouvoir l’image sur Internet de ses fournisseurs, parfois de ses clients. On est plus fort en groupe que seul. Du coup, je développe des sites pour des PME qui travaillent avec mes clients et, en général, cela suffit à booster leur image. C’est parfois spectaculaire, en particulier dans le domaine du tourisme ou de l’agroalimentaire. Mais en fait, ça fonctionne toujours. Je n’ai jamais vu, que ce soit chez moi ou chez mes concurrents, d’échec véritable. Je parle de mes concurrents compétents bien sûr.

GabonReview : Donc si je résume, créer son site Internet permet de booster l’image de son entreprise et de faire de sérieuses économies de papier…

Xavier : Non, pas tout à fait. Créer un BON site Internet et développer une stratégie pour y faire venir ses clients est très efficace. Pas seulement créer un site !

GabonReview : Et pourquoi plus au Gabon, par exemple, qu’en Europe ?

Xavier : D’abord parce qu’ici c’est nouveau. On se démarque toujours en étant un peu en avance sur les autres. Mais surtout parce que la structure du business n’est pas la même. La concurrence est moindre, du moins localement, les besoins plus limités et les infrastructures défaillantes. Donc Internet s’avère être la façon la plus efficace de diffuser une information. Et puis je simplifie beaucoup là. Il y a de très nombreux autres facteurs qui interviennent : l’absence de sources d’information fiables, l’incompétence des personnels d’accueil, au téléphone en particulier, l’ignorance des clients qui ne savent pas vraiment ce qu’ils veulent… Autant de choses auxquelles un site répond sans soucis et sans coût supplémentaire. Enfin, étant donné que beaucoup d’entreprises ont pris l’habitude de travailler avec Internet du fait que leurs fournisseurs sont à l’étranger, c’est un atout considérable d’être présent localement mais de proposer le même confort qu’un concurrent français ou chinois.

Tout cela est encore renforcé par l’arrivée massive d’Internet sur tous les smartphones dont sont friands les leaders d’opinion en Afrique. Un “boss” sans smartphone connecté, c’est devenu très rare et toutes les occasions sont bonnes pour s’en servir !

GabonReview : Alors, pourquoi les PME font-elle aussi peu appel à Internet pour leur communication ?

Xavier : Parce qu’elles ont du mal à trouver un fournisseur correct pour réaliser leur site d’abord. Ensuite parce que les décideurs financiers, souvent le patron de la PME lui-même, sont encore trop souvent âgés et peu sensibles à Internet. Mais c’est un atout pour celles qui font l’effort d’y aller : elles sont encore rares, donc d’autant plus remarquables… et remarquées.

 
GR
 

9 Commentaires

  1. GERARD SAIZONOU dit :

    C’est l’entrevue la plus plus ridicule que j’ai lue depuis que je viens lire les nouvelles du Gabon sur ce site. Alors le monsieur mission impossible qui ne dit pas son nom et qui se prend pour james Bond parce que il  »désire rester discrets sur mon identité  » quelle connerie. Mais la bêtise ne n’arrête pas là, notre frère qui a parvenu dans les TI chez les Toubab est heureux d’être le seul petit canard noir !! et se se dit  »hors de prix’parce que les frères qui sont au pays eux ils ne sont pas hors de prix (pitié)mais cheap.
    Africain, quand vas-tu être modeste, même avec tes propres frères, modestie, modestie, pitié.
    Même quand ton boulot est ordinaire tu trouves le moyen de le faire passer pour un job spécial. Au pays des aveugles les bornes sont rois.Pitié de nous…

    Gérard SAIZONOU
    GENERAL MANAGER WEBPRESENT CANADA

  2. Lestac dit :

    Hou le vilain ! Mais au fait, qui est le prétentieux là ? Celui qui préfère rester anonyme ou celui qui signe General Manager dans un commentaire sur un article de presse ?

    J’ai plutôt le sentiment que ce monsieur profite de gabonreview pour faire sa pub puisque, apparemment, il fait grosso modo la même chose que ce Xavier.

    Sinon, d’après ce que je connais de mon pays, le Gabon, je confirme tout ce qe dit ce Xavier. Y compris sur l’amateurisme de la plupart des « concepteurs » de sites. Bon, pas qu’eux. C’est valable dans tellement d’autres domaines !

    • GERARD SAIZONOU dit :

      Lestac,je suis tout à fait d’accord avec vous de l’impression que ma première réponse peut laisser pressentir et que peut être que j’aurai écrit les mêmes choses que vous lors d’une première lecture de mes propres propos.
      Toutefois, il est important de montrer la réelle situation au Gabon même si beaucoup de choses doivent évoluer au Gabon comme dans le reste de l’Afrique, il y a beaucoup d’entreprises dont on n’entend pas parler, mais qui font des choses intéressantes et ces entreprises sont au Gabon.
      Il est vrai que le taux de personnes non  »bancarisées » est faible au Gabon, mais
      http://www.gabonsurf.com/ticket.php offrent des cartes pour permettre aux Gabonais de faire des
      achats sur internet ( sans vouloir faire de publicité pour cette entreprise).

      Dans le domaine de la vente en ligne, il y a au Gabon http://www.gaboncoin.com/ qui sert de plateforme de vente sur internet et fait de la publicité sur Facebook pour le marché Gabonais, malgré le taux de bancarisation faible, mais ils ont trouvé une solution pour pallier à ce manque.

      En ce qui concerne la veille concurrentielle et le déploiement de stratégies numériques là encore il existe des entreprises gabonaises qui sont efficaces comme : http://www.excellforme.net, ou encore
      http://www.gelgabon.net/creation-hebergement-referencement-sites-internet à Port-gentil. Je ne vais pas citer tous les sites gabonais ici , mais il y en a beaucoup sur la place publique qui ne sont pas hors de prix, mais sont gabonaises. Il faut juste bien chercher sur le marché gabonais les entreprises capables de faible des choses professionnelles.
      Le Gabon regorge de beaucoup de talents dans tous les métiers des TI mais ils faut les connaître comme Lord Kévyn aussi:
      http://www.gaboneco.com/show_article.php?IDActu=13683

      Mais il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain.
      Par ailleurs le fait de signer General Manager est un souci de transparence et d’information.

      • maxlamenace dit :

        eh.. Franchelent je vois pas ou est le professinalisme, animations flash mal doseées, trop de couleurs pour cetains, et des logo recuperees sur des logiciels de demonstration que g bidouillé par le passé, je pense a aaalogo…. Bref. Si je suis une entreprise, aucun de ceux la ne sera selectionné (je reste professionnel et prefere payer le prix cher) . Ce domaine doit rester réservé aux pro.

        @the duke- > il est vrai que linfra de reve avec tous les operateurs interconnectés chez Gabon Telecom et fibre optiquec pas pour demain(d’après mes calculs, on devra attendre 52ans encore :)) par contre la communauté peut forcer le destin, en creant son propre operateur (on balance la sauce sur tout libreville avec des solutions radios sans licences tous les 5km dans libreville, ubiquity a tout ce quil faut a moindre)on fou le bordel dans les ondes radios et on arrose les clients finaux illegaux en pont wifi, la les politiques comprendront quil ya un vrai pb dinfrastructure au pays. Pour info, the duke (ton nickname)e est un outil de merde pour faire du monitoring, ca te plombe la bande passante inutilement, tourne toi ves nagios si tu veux monitorer. A+

  3. L'indigné dit :

    Moi je trouve plutôt charmant. Quand on réussi faut s’en orgueillir. A bas le rageux!

  4. Luc Lemaire dit :

    Merci à tous pour ces commentaire. Je me permets d’intervenir pour faire remarquer que Xavier ne dit pas que personne n’est capable au Gabon. Juste que ce n’est pas facile d’y trouver chaussure à son pied pour des chefs d’entreprises novices dans ce domaine. Et il est vrai que les réalisations de qualité sont rares. Pas inexistantes, heureusement. D’autre part, le travail qu’il fait est destiné à de grands groupes et non à des PME, d’où sa remarque sur sa « chèreté ». Enfin, ce que vous semblez prendre pour de la prétention était en fait de l’auto-ironie. Je doute qu’il aurait pris 2 heures pour en parler avec moi un dimanche s’il avait « snobé » les gabonais.

  5. The Duke dit :

    Avant de parler de prestation à valeur ajouté il faut une structure de base. Et c’est souvent le problème qu’on a en Afrique, on se lance dans des développement sans avoir la base. Ce que Mr Xavier dit est intéressant mais quand on analyse il s’agit de multinational qui ont des antennes en Afrique. Ces multinationales ont leur site hébergé en Europe ( à moindre cout, payable en ligne) et jouissent d’une disponibilité à 99,99 %.

    Pour revenir sur la structure de base je parle de l’infrastructure, le réseaux, le support etc … et qui doit donner le ton chez nous c’est Gabon telecom. Comment voulez vous que l’on ai des moyens de paiement si les support de communications ne sont pas fiables ?
    comment voulez que les Ingénieurs réseaux travaillent dans leur coeur de métier si ya pas d’infra. ?
    Quand ces supports de communications seront en place là oui on pourra ajouter les services supplémentaires comme ceux de Mr Xavier.
    Libreville est rempli de antenne VSAT, pour communiquer entre Owendo et le centre ville il y a du VSAT, de la radio etc mais l’essentiel c-a-d le cable le filaire !!c’est du jamais vu. Ce n’est pas à Internet Gabon ou Solsi etc de nous donner le ton mais à Gabon Telecom.

    Les meilleurs exemples en Afrique sont le Senegal, le Ghana, Togo, Benin.
    Donc je trouve que Mr Xavier ne connait pas bien l’environnent Gabonais car quand on est une société PME ou pas qu’on paye pour un service ( disponibilité) et que ce service n’est pas disponible cela ne sert à rien de mettre à jour son site WEB.
    le problème il est là.

    c’est comme si on veut faire rouler une ferrari à lbv et on se plaind c’est normal il n’y a pas d’infra pour : il n’y pas de ROUTE

    The Duke
    @Paris

  6. Olivier Ongotha dit :

    Je pense que Xavier a le droit de rester anonyme et aussi de définir son positionnement. Je pense aussi que s’il y a une couronne le trône est à prendre dans le secteur (…) chaque entrepreneur est libre de faire parler de lui et de son activité comme il l’entend. Les acteurs du secteur qui souhaiteraient plus de visibilité devraient faire plus de RP ou s’organiser pour mettre en place des événements types : meetup,barcamp, etc…
    Organiser le secteur, l’animer fera inévitablement remonter les meilleurs pratiques et les innovateurs 😉

    Ainsi les

Poster un commentaire