Il devient urgent d’engager des réformes structurelles, adoptées par consensus et menées avec le soutien du plus grand nombre.
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Tantôt baptisée «dialogue des dialogues», parfois appelée «dialogue de synthèse», souvent désignée par «grand dialogue», quelquefois qualifiée de «troisième dialogue», la concertation nationale regroupant participants au Dialogue national pour l’alternance et ceux engagés dans le Dialogue politique en cours aura-t-elle lieu un jour ? A-t-elle encore un sens ? Depuis la dernière prise de position de l’Union européenne (lire «L’Union européenne dubitative»), cette question hante les esprits. Lancinante, elle est au cœur de tous les échanges. Obsédante, elle revient dans toutes les conversations. Quel crédit accorder à des pourparlers menés en l’absence d’une des parties opposées ? Quel destin pour une rencontre déjà désavouée par une des organisations les plus représentatives de la communauté internationale ? Comment accréditer l’idée d’un soutien de Paris quand Bruxelles fait la moue ? Peut-on sortir des initiatives partisanes ? Peut-on faire l’économie d’une initiative nationale et réellement républicaine ?
On peut toujours se gargariser de mots. On a  toujours la latitude de minimiser le poids de l’Union européenne ou l’apport de sa coopération avec le Gabon. Mais la réalité est là, dure et implacable. Non seulement, la France est avec 17,81% le deuxième contributeur du Fonds européen de développement (Fed), mais en plus elle s’efforce désormais d’orienter la coopération européenne. Sur des thématiques comme la paix, la sécurité, le développement ou les changements climatiques, elle indique la voie à suivre. Dans bien des cas, elle délègue la mise en œuvre de ses orientations stratégiques à l’Union européenne. De ce fait, il est aujourd’hui illusoire d’essayer d’établir une distinction entre ces deux entités. En clair, l’Union européenne ne peut agir en Afrique francophone sans l’aval ou tout au moins le silence bienveillant de la France.
Une nécessité, une urgence
La dernière prise de position de l’Union européenne ne saurait être comprise comme une initiative solitaire. Intervenue le jour même où s’ouvrait le Dialogue politique voulu par Ali Bongo, elle a tout d’un avertissement voire d’un coup de semonce. Le moment choisi, les thématiques abordées et la tonalité du communiqué renforcent ce sentiment, les circonvolutions rhétoriques et la langue de bois diplomatiques ayant fait place à une certaine truculence. N’empêche, Européens ou Gabonais, militants de l’opposition ou de la majorité, tous les protagonistes ont intérêt à sortir de la crise politique née de la présidentielle contestée d’août 2016. Personne ne peut aujourd’hui nier l’atonie générale du pays. Tout et chaque jour, des entreprises mettent la clé sous le paillasson quand d’autres évoquent cette perspective. Comme le confirme la présence remarquée du Fonds monétaire international (FMI), la situation économique est préoccupante.  Comme l’attestent les conclusions du Sommet de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (Cemac), tenu à Yaoundé en décembre dernier, la situation financière est catastrophique (lire «Les chefs d’Etat disent niet à la dévaluation du franc CFA») . Or, dans l’attitude du FMI, le point de vue de la France est déterminant. Mieux, dans la gestion de la monnaie, son avis ne divergera jamais de celui de l’UE.
Dans ce contexte, il devient urgent d’engager des réformes structurelles, adoptées par consensus et menées avec le soutien du plus grand nombre. Certes, certains acteurs seront toujours guidés par la volonté de conserver leurs privilèges ou préserver leurs prébendes. Certes, il s’en trouvera toujours pour magnifier l’usage de la force, vanter les collusions institutionnelles ou convoquer un patriotisme de circonstance. Mais, il faudra bien éviter une dévaluation à venir ou tout au moins créer les conditions d’une mise en œuvre harmonieuse d’un plan d’austérité. Au-delà, il faudra réconcilier le pays avec son histoire, permettre à chacun de répondre de ses actes et ouvrir la gestion du bien commun à toutes les intelligences. Pour atteindre ces objectifs, «un dialogue réellement inclusif et débouchant sur des réformes structurelles» est une nécessité voire une urgence.
Face au présent et au futur, la responsabilité des acteurs politiques, singulièrement ceux de la majorité, est immense. Il leur appartient de traduire en actes les recommandations de la Mission d’observation électorale de l’Union européenne, de donner des gages de respect des libertés fondamentales, d’ouvrir une enquête indépendante sur les violences post-électorales et de faciliter la transparence dans la vie publique. L’Union européenne ayant déjà livré son appréciation du processus en cours, la majorité politique gagnerait à revoir sa copie. En tout cas, en âme et conscience, chacun doit, dès à présent, s’interroger sur le sens et la portée de son positionnement.
 

 
GR
 

0 Commentaires

  1. Fabien Engouang Ovono dit :

    Très belle analyse.

  2. Tiratata dit :

    On devait partir des individus, des familles, des quartiers, des villages ou arrondissements, des villes, des départements, des provinces, etc. Pour que ce dialogue soit national et représente une catharsis pour tout le monde.
    Hors on s’est enfermé.
    Dit des forums et états généraux du 1er mandat raté.

  3. NYAMA dit :

    Belle synthèse !
    Si les gens au pouvoir pouvaient avoir un peu de ‘bon sens » dans l’intérêt général de la Nation.
    La dignité et la lucidité permettraient de mettre de l’eau dans son vin, mais nous constatons malheureusement que ce pouvoir ne veut pas voir la réalité des choses est prêt à appauvrir davantage le peuple qui chaque jour qui passe s’enfonce dans la misère.

  4. Guilou Bitsutsu-Gielessen dit :

    Roxane, permettez moi de vous dire: soit vous tournez en rond avec ce sujet, soit vous faites dans une opération de lobbying qui ne dit pas son nom.
    Il y’a dialogue au Gabon parce que la France l’exige. Point barre!
    Elle a été partie prenante dans la situation elle veut en être la solution.
    La France en exigeant le dialogue, avait intégrée l’option de la possible non participation de Ping. Cette non participation étant confirmée. Dans ce cas, il ne restait plus qu’à la France de s’assurer de la participation de Ping aux législatives. Cette assurance, il semblerait qu’elle l’est obtenue lors du fameux voyage éclair ( motif Alzeimer) de Ping à Paris.
    Les dialogues (Ali, Ping) ne sont pas des curseurs sur des enjeux de luttes de pouvoir, encore moins des boussoles de l’activité politique. En d’autres termes Roxane, revenir sur le dialogue et ses éventuels schémas d’organisation est un cap d’analyse dépassé et dorénavant inutile…
    Le curseur est déjà sur le rapport de force des enjeux de l’organisation des législatives, sur la future physionomie de l’assemblée nationale, sur le renouvellement de la classe politique, sur le gouvernement d’ouverture, sur le FMI ( en moins de 2 décennies le FMI est de retour) Grosse préoccupation pour le devenir des populations.
    Pour autant Le dialogue d’Ali Bongo est-il inutile? Non! le dialogue est un processus démocratique il ne doit jamais être sous-estimé. Ce dialogue est d’autan important qu’il accouchera d’une refonte des institutions. Une énième refonte des instituions, vous diriez.. Oui c’est vrai! Mais une refonte tout de même. Quand on touche aux institutions de la république c’est pas banal..
    Quant à l’Union européenne, elle fait du bruit, rien que de bruit.. La communauté internationale en ce qui concerne le Gabon se limite à la France. L’UE ne peut sanctionner le Gabon sans obtenir l’aval de la France… Pas d’inquiétude de ce côté, le Gabon sous la bannière de la France ne coulera jamais! La France fera toujours en sorte, qu’il reste un pays sous développé et en paix, avec une classe politique sous tutelle.
    Bien entendu, la France sait où elle mène le Gabon par contre c’est la Gabon qui ne sait pas où il va…

    • Révérend Pasteur Israël Nahum dit :

      Guilou Bitsutsu-Gielessen,
      Je vous ai bien lu mais il semble que je ne vous ai pas saisi du tout : vous voulez me dire que Jean Ping au départ savez que les français le feront échoué à l’élection présidentielle mais qu’il est allé cas-même ? Et que tout devez plutôt se décider au niveau de l’assemblée nationale ? Mais tout ça c’est de mauvais goût ! Non. Il y a un peu de vérité dans ce que vous dites mais il se peut que vous l’expliquiez mal. Dire qu’au départ les français savaient que Ping n’ira pas au dialogue de Ya Ali Bongo est tout à fait hors contexte : oui, le dialogue était un enjeu à l’élection présidentielle de 2016 afin de ramener les opposants récalcitrants comme Ping sur le rang de la stratégie des français cependant : Ping ne l’a su qu’après qu’on l’a réellement lâché. C’est-à-dire après la proclamation de la dite élection.
      Deuxièmement, oui la future élection législative va toujours dans la même stratégie des français, de pouvoir équilibrer certains « Principes démocratiques » et non la refonte de l’État. Il se peut que même l’opposition l’emporte mais cela ne change rien à la dynamique politique de français au Gabon. Ce sera simplement endormir les gabonais : oui Ya Ali Bongo nous a voler la victoire mais maintenant, nous avons « L’assemblée nationale » cependant, le réel pouvoir sera toujours entre les mains d’Ali Bongo et des français au Gabon. Non. Les gabonais aussi intelligents que vous, vous ne devez pas rêver. Car « Le Gabon est mal partie » si les forces vives du pays ne se lèvent et disent NON aux français et à Ali Bongo.
      Révérend Pasteur Israël Nahum

  5. Gaboma dit :

    Combien de fois vais-je vous dire que des initiatives visant sincèrement la consolidation de la démocratie et de l’état de droit ne viendront jamais du PDG et des Bongos. Cette famille et le court pdgiste ont tellement fait de crimes dans ce pays qu’ils ne s’exposeront jamais à perdre le pouvoir à travers un processus démocratique et transparent qui sera synonyme pour eux de répondre un jour de l’échec du développement du Gabon à travers les crimes économiques les plus inimaginables.

  6. BBTG dit :

    Il faut que le Gabon face alors comme l’Algérie pour que la France commence à penser autrement?
    Va t-on nous imposer bientôt un président-légume et lobotomisé à la Bouteflieka pour qu’on se sente à l’aise?
    Si les dirigeants français aiment tant le Gabon comme ils le prétendent et le démontrent très bien, pourquoi ne viennent-ils pas s’installer avec toute leur population au Gabon et nous on va en France? Ainsi le pb sera vite résolu!
    Ils auront tout sur place pour développer leur pays-province occidental!

    • Révérend Pasteur Israël Nahum dit :

      je suis tout à fait d’accord avec vous. Et c’est ce que vous deviez enseigner à tous les gabonais, car nous sommes desormais sur cette possibilité: que le Gabon devient, une autre Algerie.

  7. Révérend pasteur Israël Nahum dit :

    Nous sommes tous pour que le Gabon, notre cher pays trouve le consensus par ses enfants au travers du processus de la paix durable mais quand on se fabule avec des théories journalistiques ou autres : « La paix se gagne, elle ne se donne pas». « On peut vouloir la paix mais il faut l’emporter » Et cela non pas par des canons ou par une analyses de la raison soit elle bonne mais par « un processus démocratique «la philosophie politique : instaurer des principes démocratiques, développer des processus ou des réformes qui favorisent la démocratie»», c’est-à-dire des reformes en amont qui emballent toutes « Les forces vives d’une nation » et non en avale. Vous n’allez pas tuer mon Coq et me dire vient manger cas-même quand je n’ai pas décidé ainsi ! Ça c’est quelle faire ? Vous n’allez pas voler mon mouton et me dire c’est pour le bien de la république ? Non ! Il y a des choses qu’on ne peut confondre même si c’est quelque chose d’impératif « Il devient urgent d’engager des réformes structurelles, adoptées par consensus et menées avec le soutien du plus grand nombre. » Mais qu’est-ce qui est plut urgent est-ce le plafond d’une maison ou le soubassement ? Mais je crois que c’est plutôt le soubassement. Si notre pays a des problèmes et surtout, quand nous remarquons que la plus part des dignitaires mécontents du pays se retrouvent aujourd’hui dans l’opposition radicale et hostiles au dialogue de l’autre : C’EST PARCE QUE LE RÉGIME VOIT PLUTÔT LE PLAFOND DE LA MAISON AU LIEU DE VOIR LE SOUBASSEMENT « Comment accréditer l’idée d’un soutien de Paris quand Bruxelles fait la moue ? Peut-on sortir des initiatives partisanes ? Peut-on faire l’économie d’une initiative nationale et réellement républicaine ? » Je dis non. Le dialogue n’aura pas des bons fruits qui sortiront de lui. Pourquoi ? Parce que le régime en place a volé le mouton qui appartenait à quelqu’un d’autre et pour que la paix revienne, il faut remettre le mouton au propriétaire, si non ce sera forcer la main des opposants à faire quelque chose qui semble impossible. Vous n’allez pas voler mon diplôme, mon terrain, etc. Parce que vous êtes le fils de l’autre et de me dire c’est pour le pays et assis toi tout prés de moi, comme si j’étais incapable de construire sur mon propre terrain avec mes propres compétences que j’ai acquises longtemps. Car selon Rousseau, la justice ne peut pas se définir comme «Le droit du plus fort.» Voilà le réel problème au Gabon «Si la justice était ainsi, les individus les plus puissants seront toujours les plus justes.» Car le droit des peuples est universel et intemporel ainsi « Le droit des citoyens dans un pays libre comme le Gabon. » Pourquoi ? Parce que la force peut changer de camp.
    Si au Gabon le régime voit plutôt les fissures du plafond alors que les opposants voient plutôt les problèmes du soubassement : ramener ces deux camps sur une même logique se sera tout un casse-tête-chinois ou les gabonaises et gabonais aujourd’hui sont muselés.
    Révérend pasteur Israël Nahum

  8. JUSTICE dit :

    La nature nous enseigne qu’il faut renouveler ou mourir. Le Gabon se meurt par manque du renouvellement permanent de ses gouvernants. La cigale ayant chanté tout l’été et se trouvant fort dépourvue quand la bise fut venue alla trouver la fourmi…Trêve de dialogues! On a trop « blablaté ». Place au travail! Mais, avec les mêmes, on ne peut malheureusement pas travailler. Trop de choses mauvaises ont envahi le cerveau du gabonais. Il faut tout mettre à plat; en commençant par le sommet. Pour espérer guérir de la gangrène de la corruption et de la paresse maladive et imposée!!

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