Partant pour le dialogue national d’Ali Bongo, le président de la Convention nationale de l’interposition (CNI) entend soumettre un ensemble de propositions au cours de cette concertation. Dans cette interview accordée à Gabonreview, l’ancien candidat à la dernière présidentielle plaide notamment pour la mise en place d’une commission «Vérité et Réconciliation», pour sortir le pays de la crispation actuelle.

Dieudonné Minlama lors de son interview, le 29 décembre 2016 à Libreville. © Gabonreview


 

Gabonreview : Peu après la proclamation des résultats de la dernière présidentielle, par le ministre de l’Intérieur, vous avez accepté de vive voix le dialogue appelé par Ali Bongo. Le Premier ministre vous a-t-il consulté à cet effet ?

Dieudonné Minlama : Avant tout, je tiens à rappeler que pendant les émeutes, après la proclamation des élections, j’ai organisé une conférence de presse où j’ai été très clair : J’ai demandé au président de la République d’aller directement au dialogue avec les autres Gabonais. Je l’ai ensuite rencontré et nous avons discuté de vive voix. Après, le président, par l’entremise de son porte-parole du gouvernement, a officiellement annoncé la tenue du dialogue national. Je l’ai accepté car, comme je n’ai de cesse de le rappeler : je me bats pour le dialogue depuis 2011. D’autant que cette concertation est une nécessité, un impératif. J’ai par la suite rencontré le Premier ministre, avec lequel nous avons échangé sur ce que je pense du dialogue national. En ce qui me concerne, je suis prêt pour cette concertation.

Quel serait le poids de Dieudonné Minlama dans le cadre de votre participation à ce dialogue ? Qu’allez-vous proposer, concrètement, pour sortir le pays de l’impasse actuelle ?

Je ne parlerai pas de poids, mais de la pertinence des idées défendues pour sortir le pays de l’impasse. Le dialogue pour lequel je milite est multidimensionnel. Ainsi, mon premier combat est d’éviter que nous ayons un «dialogue-anonymat», qui s’articulerait uniquement autour de la dernière élection présidentielle. D’autant que ce dialogue avait déjà été appelé de tous ses vœux par le chef de l’Etat, bien avant le scrutin du 27 août dernier. Pour moi, ce dialogue devrait essentiellement tourner autour des réformes politiques, qui aboutiraient à la réforme de notre Constitution, des institutions électorales, de la loi électorale, à un équilibre institutionnel, à un nouveau découpage électoral, etc. Au-delà du cadre politique, il y a également le cadre social. Depuis 1990, le Gabon est en grève et ce dans tous les secteurs d’activité. Ce qui est très alarmant.

Je crois qu’il est temps que nous nous asseyons pour régler ces problèmes qui minent le corps social national. Ainsi s’articule le deuxième axe sur lequel je souhaiterais que nous travaillions. Le dernier est celui que j’ai appelé la «face sombre de l’héritage Bongo». En 2009, Omar Bongo avait fait le bilan de son action politique et son intime conviction était que chacun de nous méritait mieux. Je milite ainsi pour la mise en place d’une commission «Vérité et Réconciliation». Ce dialogue auquel nous aspirons doit nous amener à nous pencher sur la gestion du pays avec, en filigrane, la réconciliation entre la classe politique et le peuple Gabonais. Car la crise de confiance entre les deux camps est palpable.

En tant que candidat de l’interposition à la dernière élection présidentielle, pourquoi n’avez-vous pas pris part au dialogue de Jean Ping ? Pensez-vous que cette concertation était inapte à trouver des solutions aux problèmes du Gabon ?

Je ne voudrai pas faire dans le sectarisme. Je suis pour un dialogue avec tous les Gabonais. Il y a deux ans, la société civile était sur le point d’organiser un dialogue. Et à ce moment-là, j’avais dit à mes pairs que nous ne voulons pas d’un monologue, avec uniquement les acteurs de la société civile. Mais un véritable dialogue, où toutes les sensibilités sont représentées. J’ai remarqué que les gens se sont réunis autour du président Jean Ping, ce qui est bien. Mais, à mon avis, la vision était la même à cette concertation.

Or, moi je veux quelque chose de beaucoup plus contradictoire. Je souhaite donc que ceux qui sont avec Jean Ping, avec Ali Bongo, ou avec moi dans l’interposition, se retrouvent. C’est un moment important de l’histoire politique de notre pays. En gros, je m’attends à un dialogue où toutes les sensibilités seront représentées. Pour que les conclusions et recommandations issues de cette concertation, puissent être applicables pour le bien pays.

Pendant la campagne présidentielle, vous vous êtes attaqué aux dirigeants de l’opposition qui auraient détourné des deniers publics, en évitant soigneusement d’en faire de même avec ceux du pouvoir. Parti pris ou manque de courage ?

Ni l’un ni l’autre ! Je pense que mes propos n’avaient pas fidèlement été relayés par les médias. J’ai reproché au pouvoir de n’avoir pas construit des écoles, des logements sociaux. Pourtant des budgets ont été votés pour ces chantiers…En gros j’ai fais des reproches à l’ensemble de la classe politique gabonaise, comme l’avais déjà fait le président Omar Bongo en 2007. Celui-ci avait déploré le fait que l’argent décaissé pour construire les routes, a été détourné par les uns et les autres. Et il s’avère aujourd’hui, que les un et les autres sont aussi bien dans l’opposition que la majorité. Je me suis donc insurgé contre la même classe politique qui a mis le pays à terre, et qui continue à le piller.

Il y a quelques jours, Hervé Opiangah, un des plus proches collaborateurs du chef de l’Etat, a indexé certaines personnalités du camp présidentiel comme de grands détourneurs de la République. Vous n’avez toujours rien dit à ce sujet. Ne pensez-vous pas que ces cas qui cachent un phénomène beaucoup plus vaste, doivent donner lieu à une enquête approfondie ?

Le président de la CNI. © Gabonreview

Je tiens avant tout à féliciter Hervé Opiangah. Je le connais courageux et j’imagine que sa démarche n’est pas fortuite : c’est quelqu’un qui pèse ses mots. Il a cité nommément certains responsables, même si je pense que cette liste aurait pu être allongée. C’est pour ce genre de choses que je milite pour la commission «Vérité et Réconciliation». Voici des dossiers qui doivent être traités dans cette commission, au sein de laquelle pourraient être prises un certain nombre de mesures à l’endroit de fossoyeurs de la République, reconnus comme tels.

Dans ce sens, ladite commission devrait avoir tous les moyens nécessaires pour enquêter sereinement sur les dossiers qui seraient déposés sur sa table. Les Gabonais ont le droit de savoir ce qui a été fait avec l’argent du contribuable, sur les 40 dernières années au moins, c’est très important ! Et   je pense sincèrement que cette commission pourrait marquer le début de la fin de l’impunité et le début d’une meilleure gouvernance dans notre pays.

Si les cas de malversations évoqués par Hervé Opiangah sont avérés, quel crédit accorder à l’exécutif en matière de gouvernance ?

La mal gouvernance n’incombe pas uniquement à l’exécutif actuel. Omar Bongo avait déjà fait le point en 2007 et six ans plus tard, en 2013, Ali Bongo est longuement revenu sur ses maux liés à la gestion et ayant la peau dure au Gabon. La gangrène est très répandue et ce, depuis plusieurs années. C’est pour cette raison que je n’indexe pas l’exécutif, mais l’ensemble du système avec lequel il faut rompre. Et aujourd’hui, pour atteindre cette horizon, la commission «Vérité et Réconciliation» apparaît comme un moyen crédible de mettre un terme à ces dérives nous empêchant d’aspirer au développement.

 
GR
 

24 Commentaires

  1. Révérend pasteur Israël Nahum dit :

    si les pères ont abattu les gros okoumés, les enfants du Dialogue national d’Ali Bongo accouchera les baobads.

  2. Genéviève Medouang dit :

    Franchement ce Milama se croit intelligent? Il ne veut pas parler ouvertement. Il roule la langue de bois comme jamais. Il ne peut pas attaquer l’exécutif, pourquoi? Il tourne autour du pot et dit des choses connues de tout le monde. Dans le puzzle, je me dis en réalité qi’il n’a pas droit à la parole avec ses 0,00000%. En tout cas, je trouve qu’il joue un jeu celui du pouvoir. Il est vendu méme s’il fait semblant. C’est ce que je crois.

  3. Bobby Lee Mwanda dit :

    Mr Minlama,Opianga est d’esprit clairvoyant,sincère et pragmatique ,à vous suivre,quant à la détermination des responsabilités dans la gestion calamiteuse des finances publiques gabonaises. Malheureusement vous n’avez pas prevenu,en début d’interview que vos dires releveraient de la pire politique d’autruche.

  4. Obus dit :

    ce dialogur était appelé de tout ses voeux par….!

  5. Rocco Odem dit :

    L’intervention d’opianga dit long sur ce que nous savons deja. La majorité des personne de cette classe politique majorité comme opposition doit rendre des compte au peuple. Il est trop facile de passer à autre chose avec tout les casseroles qui traînent.
    Toutefois je suis d’accord tout le monde doit s’asseoir disputer et trouver un terrain d’enttente pour la stabilité de notre pays.

  6. diogene dit :

    Avant 1990 le droit de grève n’existait pas !
    Le dialogue débute en 2011, le beau au bois dormant s’éveille cinq siècles après tout le monde (quatre et demi de colonisation et un demi de néo colonisation – changement de peau des bouffons-).
    Et il prêche pour la constitution des années 90, alors que son interlocuteur n’a cessé de la trahir, la maquiller, la travestir, la déshabiller, finalement la tuer…
    La liste des corrompus peut être prolongée, allez y ! On vous écoute !
    Siiiiilence.
    Seriez vous sur la liste ?
    Vous en appelez à la justice, parfait dans un pays qui en a une et indépendante encore, mais au bongoland …
    Du haut de votre esprit vide, de votre âme desséchée, de votre corps mou, vous partez au dialogue…N’oubliez pas quelqu’un pour porter les mallettes au retour.
    Vérité et réconciliation avec des membres nommés par le « président » ? Élus par les votants fictifs du Haut Ogooué ? ou descendus du ciel ?
    Merci, vous au moins vous savez nous faire rire !

  7. Kass dit :

    Je trouve assez curieux que M.Minlama passe son temps à citer Omar Bongo, est-il un de ces admirateurs? Finalement il est plus pédégiste qu’autre chose ou simplement bongoiste?

  8. Nzamata mine dit :

    N’importe quoi, voila quelqu’un qui fait la politique du ventre, les pions de ya Ali… C’est regrettable!

  9. Vous nous décevez. Regardez en RDC le pouvoir a discuté avec l’opposition sans les véritables poids lourds de ce camp politique ou en sont-ils? il y a un nouveau dialogue qui va démanteler tout ce que les achetés comme Milama ont accepté. De source sure Ali préfère discuter avec Ping que tous les zéros pour cent comme Milama. Allez au dialogue pour prendre l’argent mais tôt ou tard comme le disait un écrivain Camerounais, le dialogue entre Ping et Ali aura lieu quand saura qu’il est en position de force et vous les achetés vous aurez honte comme en RDC.

  10. Le gabonais dit :

    J’ai l’impression que dans ce pays, une fois qu’on devient opposant tout nos crimes sont blanchis.
    Les malversations, la mauvaise gestion, les détournements de bien sociaux, les crimes aussi bien économiques que rituelles; ces dégâts ont commencé depuis l’époque de Bongo père.Et à l’epoque de bongo pere nos leaders opposants y étaient et la vie était rose.
    Je veux qu’Ali parte moi aussi. Mais remboursez aussi au peuple ce que vous lui avez volé. Majorité comme opposition. . Donnez nous des comptes.
    Quand je vois certains certains cme ce cancez de Moudounga apres avoir semé la zizanie al’éducation nationale venir dire qu’il est opposant apres avoir fait souffrir nostre système educatif…et bien j’en ris.

  11. Boumba dit :

    Minlama à la clairvoyance de proposer des pistes de solution pour sortir le Gabon de la crise sans partie pris, ne se rangeant ni du côté de Ping ou du camps d’Ali,et en se rangeant du côté du peuple et des ses aspirations, une alternance pacifique, de réelles institutions démocratiques…

    • libre dit :

      Dans tes rêves ! Vous donner le bâton pour le chasser du pouvoir qu’il compte garder à vie, vous rêvez, la CPI, les procès sont derrière ce pouvoir, et vous pensez à quelle alternance avec tout ça. En tout cas ils ne sont pas fou! Rêvez tout simplement en attendant d’être déçus

  12. MBENG dit :

    Il faut un véritable dialogue, pas un monologue, ou un dialogue galvaudé, un dialogue de vainqueur ou de celui de vaincu, c’est l’appel de Minlama à travers cette interview, afin de répondre aux attentes du peuple, à une alternance pacifique. Mais je comprends que ce dialogue souhaité par Minlama fasse peur à beaucoup de personnalité politique qui craignent de rendre des comptes, ou de perdre leur petit privilège.

  13. jean mabika dit :

    Au lieu de jeter des pierres à Minlama demandez plutôt aux hommes politiques qui est responsable de la situation actuelle de notre pays? Passé dans l’opposition ne vous blanchit pas du tort que vous avez causé au peuple. Minlama est un acteur politique qui a le mérite de proposer des pistes de solution pour sortir le pays du blocage. Les gens qui souhaitent le monologue ou le statut quo sont des suicidaires prêts à faire couler le sang du peuple pour leur intérêt personnel.

  14. jean mabika dit :

    Le dialogue ne doit pas être un échange entre des gens partageant un même point de vue, mais des personnes avec des avis opposés, avec obligation de trouver une solution commune, c’est là que réside que l’itv de Minlama.

  15. Iga dit :

    Qui a peur d’une commission vérité et réconciliation ? En tout cas ce n’est certainement pas Minlama qui n’a rien à se reprocher, contrairement à beaucoup de ses pairs dans la majorité comme dans l’opposition, obligé de bloquer le pays de peur d’ouvrir la boite de pandore.

  16. GERTRUDE dit :

    J’observe la scène politique gabonaise et je suis ravi de lire Minlama, je pense qu’il sort du lot, ses propositions sont cohérentes et pragmatiques, la stature d’un homme qui pense d’abord à son pays et non à lui même.

  17. Obiang dit :

    Minlama tu es jeune et tu as l’avenir devant toi, ne suis pas tous ces crocodiles coupables de tous les maux qui minent ce pays et qui pressés par le temps sont prêts à tout foutre en l’air pour prendre le pouvoir ou s’y maintenir. Tes propositions sont pertinentes et gages de stabilité pour la nation.

  18. L'observateur dit :

    Pourquoi centrer le debat autour de Minlama? Vraiment la vérité varie selon que cela arrange les un et les autres.
    Le sujets des détournement est lourd et engage tous les camps. Inutile de venir jouer les défenseurs des qui que ce soit parceque Minlam mintogo implique toutes les parties dans cette histoire.
    Qu’est ce qu’il y a de faux à cela. Il ne dit que la vérité.

  19. OSSAMI dit :

    On peut tout dire, Minlama a au moins le mérite de faire des propositions. Mais pourquoi il n’a pas convaincu Ali et les autres d’aller au dialogue proposé par Ping si telle est sa préoccupation première qui consiste à sortir le Gabon de la situation dans laquelle Ali et les siens l’ont plongé.
    Notre ami Minlama est très fin et joue de la langue de bois pour nous entuber. Il roule pour l’émergent mais se cache derrière la rhétorique connu des politiciens véreux qui attendent en retour une bonne mallette de son mentor.
    Nous ne sommes pas dupe, votre référence à chaque instant à OMAR BONGO en dit long.

    • Afam dit :

      Tu racontes n’importe quoi OSSAMI.
      Pourquoi il n’a pas convaincu Ali d aller au dialogue de ping tu dis? La capacité de proposition et celle d’imposition sont 2 choses très distinctes je vous le rappelle.
      De plus la référence a Bongo en dit long en effet sur l’implication de ceux qui ont géré le pays avec lui et l’on plongé dans le chaos total.
      Pourquoi vous faites les moutons quand on sait pertinamant que le pb des détournements engagent bien les opposants qui ont été au pouvoir quand tout allait bien.
      Vous etes dupes alors.

      • Reverend Pasteur Israel dit :

        Je suis très heureux de constater qu’on au Gabon, il y a des courants politiques qui se lèvent et qui arrivent avec acharnement de soutenir même les corbeaux de la politique de la honte. Oui, la politique c’est un combat d’idées et j’en félicite les politicards gabanais.
        Mais où est la vérité? Et où est le mensonge?: la politique est une science et non une opinion d’idée. Et elle à pour but non seulement d’eclairer mais de construire. Donc, elle a des effets positifs à longue. Alors ne soyons pas dupe.
        Moi, mon père était PDgiste il avait ses raisons et je ne l’ai jamais suivi dans sa démarche. C’est des bonnes guerre!
        Mais dans le font, le Gabon à besoin des hopitaux, des écoles, des routes, du travail et plus de liberté: le PDG des Bongo peine toujours de nous livrer la merchandise.
        Reverend pasteur Israël

  20. cevance mouss dit :

    Un loup reste un loup. Merci

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