Interdits de parution pour six mois, depuis le 3 août dernier, les journaux La Une et Ezombolo, qui avaient indiqué, le 8 août, qu’ils passeront outre la décision du Conseil national de la communication de les suspendre, viennent de procéder à leur deuxième livraison clandestine. Entre pamphlet, satire et cri de rage.

L'édition clandestine de Ezombolo-La Une

Nouveaux signaux en provenance de la zone autonome temporaire où se sont installés, depuis le 8 août 2012, Jean de Dieu Ndoutoume-Eyi, directeur de la publication du journal Ezombolo et Maximin Mezui, patron de l’hebdomadaire La Une, lorsqu’ils avaient annoncé qu’ils outrepasseront l’interdiction de paraitre  qui leur a été infligé par le Conseil national de la communication. Pour «non respect des institutions de la République et les personnalités qui les incarnent», l’organe de régulation des médias au Gabon avait prescrit, le 3 août, une interdiction de paraître durant six mois à ces deux journaux.

Les compères qui avaient alors déclaré que cette «décision ne nous concerne pas (…) nous allons fabriquer nos journaux et les publier», viennent de procéder à leur deuxième livraison clandestine. Imprimé à l’étranger le journal à en-tête hybride «Ezombolo-La Une» que certains lecteurs nomment déjà «Unezo», est actuellement vendu sous le manteau.

Iconoclaste et satirique à leur habitude, l’éditorial de ces journaux assemblés se nomme «L’édito’Râle» et a pour titre «Au revoir, cher président des étrangers !». Il y est question d’un Gabon colonisé «par le Bénin, grâce à Accrombessi ; le Maroc, à travers Henri Ohayon ; et même la Somalie, un non-Etat, par Liban Soleman interposé». La livraison titre par ailleurs, sur cinq colonnes, «Face à l’arrogance d’Ali : Arrêtons de parler, passons aux actes», un texte dans lequel les auteurs indiquent que les appels à la négociation n’étant pas entendus par le pouvoir, il faut que l’opposition «arrête de croire que le pouvoir lui tombera entre les mains comme un fruit mûr, sans autre efforts de sa part que les conférences de presse et les meetings. Il faut provoquer sa chute. En devenant le vent ou carrément l’orage qui souffle.»

La livraison interlope qui compte douze pages d’articles pamphlétaires, est parsemée d’une titraille oscillant entre le sérieux et le coup de gueule, en passant par le surréalisme. Entre autres, «Les signes qu’il faut savoir décrypter», «Plus de 2 milliards pour faire exploser l’UN», «Mayila, comme le scorpion de la fable», «Ali Bongo veut imposer le pidgin au Gabon», «Accrombessi réclame sa part du butin planqué avant de dégager», «4 milliards aux marabouts pour paralyser AMO» ou «Ndongou, tu as eu !». On note également un article intitulé «Ali a commandité un sondage par rapport à la conférence nationale souveraine». On y apprend que Paris a demandé une enquête à la DGSE (services secrets français) et que le président Ali Bongo a commandité un travail similaire aux services de Contre-ingérence et de la sécurité militaire (B2). Il ressort des deux études, selon la paire de journaux proscrits, que 96 % des jeunes demanderaient la départ du président Ali Bongo, 66% des vieux seraient favorables à la conférence nationale «contre 76 % pour la tranche intermédiaire.»

On peut également signaler un billet intitulé «Pourquoi on résiste…» dans lequel il est indiqué que la nomination du président du CNC, Guy Bertrand Mapangou, a enfreint à l’article 98 de la Constitution. Et le journal clandestin d’indiquer au sujet du président de l’institution ayant interdit Ezombolo et La Une : «S’il n’a pas honte et, donc, le courage de demander que les choses soient faites dans le respect de la loi, il est mal placé pour parler de violation de la loi. Tant que cette violation de la loi n’est pas réparée, nous ne le reconnaissons pas comme président du CNC. Après tout, la loi n’est pas faite pour être appliquée contre certains et pas contre d’autres.»

Comme déjà indiqué sur Gabonreview, cet acte d’insubordination est une manifestation de la TAZ (Zone autonome temporaire), culture pirate théorisée par Hakim Bey, le philosophe moderne qui se qualifie lui-même d’anarchiste ontologiste. La TAZ «est un moment d’action dont la forme éphémère garantit sa pleine indépendance, lors de manifestation notamment, où la zone est réappropriée et libérée de toute force étatique et commerciale. La TAZ est un moment d’espace libéré où les rapports de domination doivent être abolis. Ces instants font entrevoir que quelque chose d’autre que la fatalité quotidienne est possible même si il est vrai que ces moments où tout semble s’écrouler sont en décalage avec la réalité, qui rappelle en général vite à l’ordre.»

 
GR
 

9 Commentaires

  1. ni lire ni écrire dit :

    Que de haine, que de xénophobie… Si tout ce que l’opposition a comme argument c’est le rejet des étrangers, dont d’ailleurs certains sont nés sur notre sol, ont grandi au milieu de nous et possède légitimement la nationalité gabonaise, c’est triste.
    Y a t il deux catégories de gabonais?
    Doit on donner une préférence aux « Gabonais de souche »
    Pourquoi ne pas ouvrir alors des camps de rassemblement pour ceux au « sang impur »?
    Et ensuite quoi? La solution finale?
    Cela rappelle à ceux qui connaissent l’Afrique de bien tristes parallèles. Le chant lugubre de Radio-Collines. L’ivoirité. La purification ethnique.

    • Nelson Mandji dit :

      Faut pas pousser, non plus. Ne présente pas ton peuple de façon aussi négative parce que c’est ton camp politique qui est indexé. Accrombessi n’a acquis la nationalité gabonaise qu’après la prise de pouvoir d’Ali, Jean Denis Amoussou également. Ce ne sont pas des compatriotes mais des profiteurs qui disparaitront et reprendront leur nationalité d’origine dès qu’Ali tombera. Il n’est pas question de Gabonais de souche dans la dénonciation d’Ezombolo, ni de tous les étrangers. Sinon, il fait nous montrer où il est question de Français, de Libanais, de Camerounais, de Congolais, de Sénégalais… Il n’est question que de certains Béninois, de Béninois nommément identifiés et toit le monde sait pourquoi, même toi quand tu n’es pas Pédégiste à mort.

    • Alozack dit :

      Puéril de mettre la xénéphobie sur le dos de l’Opposition. l’Assemblée Nationale: ce n’est quand même pas l’Opposition, elle qui a chassé tout dernièrement la Légion étrangère de son hémicycle!!!

    • Soupir dit :

      Ah, on atteint de point de Godwin au premier commentaire. Un petit manque d’inspiration aujourd’hui peut-être?

    • Lalala-Mont Bouët dit :

      Dans cet article, il est question de l’arrogance d’Ali, de l’opposition qui rêve, de Ndongou, de sondage sur la Conférence nationale, de Guy Bretrand Mapangou, de Zone autonome temporaire. Mais la seule chose qu’à vu Ni Lire Ni Écrire, le cher illettré, c’est le passage sur la légion étrangère et on ne voit pas le lien avec Radio Mille collines, même à la Maison blanche, on aurait déploré la main-mise de nouveau arrivants sur le pouvoir, le renseignement, les finances, les forces de l’ordre. On voit bien qui sème la haine sur ce forum et qui veut orienter le débat à son profit. La TAZ est un formidable sujet de débat, mais c’est trop fort pour nous…

      Moi, je retiens qu’il y a eu un sondage et que le peuple veut la conférence nationale. Je retiens que le président du CNC est hors-la-loi et qu’il est mal placé pour parler de respect de la loi aux autres. Qu’il commence par dénoncer sa nomination.

      • lisiane dit :

        Sondage ? J’ai lu cette édition du journal. J’ai parfois beaucoup ri, il m’est arrivé de comprendre leur indignation, mais j’ai un doute très fort sur les résultats de ces « sondages » et du sérieux de leur réalisation.

    • kabangona dit :

      @ ni lire ni écrire

      Là, vous êtes complètement hors-sujet. Tout ce que vous dites se trouve aux antipodes des préoccupations des Gabonais, dont ces journaux ne sont que les témoins. Tout ce que les Gabonais veulent, c’est que le pouvoir prenne enfin en compte leurs aspirations légitimes. Or actuellement ce n’est pas le cas. Ils veulent donc le changement. Et vous, vous réduisez cette aspiration des Gabonais légitime à de la xénophobie ? C’est une grave erreur de lecture. Trouvez autre chose.

    • Martin Modou dit :

      @Nilireniécrire

      Votre texte est bien pensé, bien réfléchi, MERCI.
      Les autres qui ne voient pas le danger d’une radicalisation ethnique, ne connaissent pas l’histoire ou du moins les histoires:
      Nazi, Rwanda, etc. pour ne citer que ces deux là.
      Mille merci Nilireniécrire. Vous êtes un grand.
      Un béninois / Gabonais qui constate que beaucoup ne font pas de discernement dans leur façon de penser, même si ils sont allés à l’école. Au fait qui a dit que l’école rendait intelligent, Hitler était aussi allé à l’école, comme Lepen (père et fille).

      Quand est-ce que CERTAINS gabonais vont comprendre que les individus sont responsables de leur action et non pas leur origine ethnique ? Quand est-ce que CERTAINS gabonais vont comprendre cela ? Quand…. ? Quand Certains gabonais vont apprendre à juger les autres sur les actions et non le caractère ethnique ??
      Même à l’époque du NET vous ne changez pas !! vous allez changer quand ?
      Alors les Gabonais de souche qui sont des voleurs vous allez les envoyer sur quel planète ? Dans quel pays ?
      Réfléchissez avent d’écrire, réfléchissez….surtout quand il s’agit de nationalité, de races, d’ethnies et tout le reste. Les dommages sont graves, lisez l’histoire de l’humanité cher frère…

      merci.

  2. Melanie Ntsame dit :

    On a compris : au Gabon une certaine tribu veut tellement commander le le pays qu’ils sont prêts à toutes les dérives verbales et pire encore.

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