Remarquée jusqu’en mai 2009 comme directrice du magazine Citymag, Marina Louetchi était également et surtout connue pour la singularité de son travail dans les arts plastiques : Elle réalisait des tableaux sans utiliser le crayon, le couteau ou les pinceaux. Son œuvre a notamment été exposée à Madrid, New-York, Dakar et dans bien d’autres métropoles. Elle a définitivement quitté la planète bleue le 9 juillet dernier, foudroyée par un cancer sur le retour.

Bas de page d’un éditorial signé par Marina Louetchi dans Citymag. © Gabonreview

Bas de page d’un éditorial signé par Marina Louetchi dans Citymag. © Gabonreview

 

A l’antipode de nombreuses filles «entretenues» de sa génération, Marina Louetchi, jeune dame qui avait milité dans le mouvement caritatif et fait des études de gestion-comptabilité, était une battante que son allure réservée et son attitude plutôt CPFH (Collier de Perles Foulard Hermès – version féminine du BCBG) ne le laissait nullement entrevoir. Elle est décédée le 9 juillet 2015 au Centre hospitalier universitaire (CHU) d’Agondjé à Libreville, où elle a été ramenée d’urgence à la suite d’un coma survenu à son domicile de Nzeng-Ayong dans le 6è arrondissement. Alors que, grâce à la chimiothérapie, elle avait déjà été guérie d’un cancer du sang et qu’elle avait repris ses activités artistiques après avoir vendu le magazine Citymag en 2009, la maladie a ressurgi et a fini par avoir raison d’elle.

Une petite idée des mosaïques sur papier de Marina Louetchi et le journal Citymag qu’elle avait créé et animé. © D.R.

Une petite idée des mosaïques sur papier de Marina Louetchi et le journal Citymag qu’elle avait créé et animé. © D.R.

Sans être née avec une cuillère d’argent dans la bouche, Marina Louetchi était issue d’un milieu social qui n’est nullement à plaindre mais qui prédispose à la bataille pour la vie. Petite, elle était toujours préoccupée par les problèmes des autres et rêvait de devenir avocat en vue de «défendre des gens, plaider contre l’injustice.» De même, elle a toujours dessiné et nombreux de ses collègues se souviennent des graffitis qu’elle aimait faire au tableau. Ses résultats scolaires l’ont cependant orientée vers les métiers du chiffre : gestion et comptabilité.

Alors qu’elle est encore aux études, elle prend des cours de Design intérieur et s’engage comme bénévole dans l’action humanitaire, notamment avec l’Unicef et Caritas. Mais, sitôt revenue au Gabon, elle entre dans la vie active et pendant quelques années, traîne ses ballerines dans des entreprises locales avant de se déterminer à vivre totalement des arts plastiques.

Ne voulant pas faire comme les autres peintres, Marina, qui avait toujours admiré les mosaïques, cherche une facture personnelle. Il lui vient alors l’idée de faire de la mosaïque sur papier. Traditionnellement, la mosaïque est un art décoratif où l’on utilise des fragments de pierre, d’émail, de verre ou encore de céramique, assemblés à l’aide de mastic ou d’enduit, pour former des motifs ou des figures. Les mosaïques de Marina seront du papier sur papier. Ne se contentant pas de créer des tableaux, Marina Louetchi écrivait énormément et disposait dans ses tiroirs d’un ouvrage qui n’attendait que d’être édité.

Elle commet, en février 2000, son premier attentat au plastique en exposant ses œuvres d’art au Centre culturel français de Libreville devant un public médusé par ce travail si particulier. Depuis cette date, les œuvres de Marina ont été accrochées aux cimaises d’une dizaine d’expositions, notamment Casablanca (Maroc), à Madrid (Espagne), New-York (USA) ou à Dakar (Sénégal), mais aussi au Méridien de Libreville ou au centre sportif Roger Butin de Port-Gentil.

Le succès de ses œuvres d’art lui permet de dégager des économies avec lesquelles elle lance, en octobre 2006, le magazine Citymag. Dans le tout premier éditorial signé par Marina Louetchi, elle explique alors que ce mensuel gratuit, en quadrichromie sur papier glacé, ambitionnait de «trouver les clefs qui ouvrent les portes de l’étonnement, du vertige, de l’euphorie, de l’invention, du ludique mais aussi du pratique» tandis que l’équipe rédactionnelle dont elle s’était alors entourée se proposait de «faire les poches de cette city qu’est Libreville, en ramener de l’esthétique et l’offrir gratuitement

Marina Louetchi refusait cependant de penser qu’elle avait réussi. Aussi recommandait-elle, à ceux souhaitaient suivre son «modeste» exemple de «ne pas papillonner entre plusieurs projets à la fois.» Elle soulignait qu’il «faut se fixer des objectifs et s’atteler à y parvenir», non sans d’ajouter : «Il y a des milliards de possibilités de réussir. Il y a toujours quelque chose à faire. L’essentiel est surtout de ne pas rester inactif. Comme on dit, aide-toi et le ciel t’aidera. Montre ce que tu peux ou veux faire et peut-être t’aidera-t-on à décoller. Il n’y a pas de coup de baguette magique sur le cours des évènements  qui ne soit asséné sans notre propre concours.»

Après s’être battue contre le cancer à partir de 2010 et l’avoir vaincu, Marina participe, en novembre 2012, à l’exposition «Regards africains croisés» à Casablanca  et, en février 2014, elle est de l’exposition «Télégramme» à Pierrefitte-sur-Seine (France). Marina Louetchi n’a jamais cessé de se battre : Se battre pour améliorer sa technique artistique ; se battre pour le positionnement de son magazine (qu’elle a vendu à l’agence Mozaïk en mai 2009) ; se battre contre la maltraitance des enfants ; se battre pour se faire comprendre ; se battre contre le cancer. Bref, se battre encore et toujours pour la vie. Mais la vie est une maladie mortelle à laquelle personne ne s’est encore jamais dérobé, même pas la battante Marina. Elle avait 38 ans.

 

 
GR
 

14 Commentaires

  1. Le Petit Librevillois dit :

    Les émegents se réjouissent et crient « jugement de Dieu » comme au Moyen Age contre quiconque artiste qui ne chante pas en premier lieu les louanges du roi régnant.

    • le Blogueur Gabonais dit :

      @Le Petit Librevillois
      un peu de respect pour une valeureuse dame de ce pays tant par son art et sa détermination j’ai pu voir certaines de ses toiles, elle faisait du bon travail et représentait le vert, jaune et bleu!!
      donc tes commentaires a deux balles sur le fait que les émergents se réjouissent mon cher ami tu peux les garder pour toi.FRANCHEMENT!!!!
      Dis toi que personne ne se réjouis de la mort de quelqu’un et je vois même pas l’importance d’un tel commentaire tant il est très déplacé et sans respect pour l’illustre disparu!!!

    • Sabrina dit :

      Ce n’est point de l’amusement , c’était une grande artiste et je ne pense point que la perte de quelqu’un soit un moment de joie. Un peu de respect pour la famille endeuillée

  2. Moucklaste dit :

    Marina, Que Dieu te prenne dans ces bras. Tu as été formidable et tu le resteras. Ton grand frère.

  3. Didier dit :

    Paix à ton âme l’artiste, que la terre de nos ancêtres te soit légère

  4. TCHIBOUELE dit :

    Salut l’Artiste, paix éternelle et repose en paix.

    Condoléances a la famille frappée par ce deuil, que puisse Dieu vous aider a surmonter cette épreuve.

  5. Blandine Lea dit :

    Reposes en paix Marina,

    J’ai eu l’occasion de te cotoyer un peu. Je me souviens d’une jeune dame discrete et assez sympathique. C’est vraiment dommage tu avais beaucoup de talent.

    Toutes mes condoleances a la famille

  6. Milangmissi dit :

    Condoléances sincères à la famille de la disparue.Ce sont les meilleurs qui partent en prémier. M.Ndjimbi vous avez vraiment rendre hommage je me souviens d’un autre papier que vous avez fait pour un autre artiste. C’est émouvant à lire et ça ne tombe pas dans le tout le monde est beau quand il est mort c’est vraiment spécifique et bien rédigé.

  7. Sabrina dit :

    Paix éternelle a une dame de valeur et a une grande artiste gabonaise

  8. Emirc dit :

    C’est Internet qui m’apprend ton départ. .. ma grde soeur repose en paix

  9. clarisse dit :

    tu es la référence du
    combat sur terre; la gloire de Dieu t’as pu lutter devant le cancer ls pb de la vue convaincu que Dieu avait une alliance avc toi que l’artiste repose en paix clacla

  10. Anabrita dit :

    À ma petite maman…je reste sans voix face à cette douleur. Repose en paix.

  11. raphael bandega lendoye dit :

    Un nom qui interpelle et qui s’éteint. Un nom de sirène et de rivière qui est un nom de jumeau, donc d’un être atypique, merveilleux. Un être d’eau et d’éther donné aux hommes pour marquer le lien entre le visible et l’invisible, la terre et l’eau et l’air. Cet être multidimensionnel s’est identifié dans un nom rendu dans sa résonance véritable,le son originel sans gommage ni artifice. Le cancer? Dieu plutôt a décidé que sa présence parmi les hommes s’achève à trente huit ans. C’est si peu mais c’est si riche. A ces peintures de contribuer à son éternité parmi les hommes. Reposez en paix, Madame.
    Raphaël Bandega Lendoye

  12. MEJ dit :

    Repose en paix ma soeur, mon dieu que tu vas me manquer.

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