A la croisée des chemins, le secteur de l’enseignement est paralysé. Manifestement, il a besoin d’un diagnostic consensuel et non d’une épreuve de force de plus.

Salle de classe vide à Libreville, Gabon.© AFP/Steve Jordan

 

Le gouvernement se résoudra-t-il un jour à prendre à bras-le-corps le questionnement des enseignants ? Depuis bientôt deux décennies et davantage depuis 2009, cette corporation est perpétuellement en grève. Entre revendications salariales, exigence de matériel didactique, dénonciation de l’insuffisance en salles de classe ou de l’inadaptation des programmes, elle est, chaque jour davantage, soumise à une épreuve de force. Filons-nous droit vers une mort programmée de l’enseignement public ? Le foisonnement d’établissements privés, tous degrés confondus, nourrit cette crainte. Assistons-nous à une dévalorisation totale du métier d’enseignant ? La tendance du gouvernement à bander les muscles entretient cette impression.

Le monde de l’enseignement est à la croisée des chemins. Tous les protagonistes sont vent debout. Ils oscillent entre colère et défiance, cherchant à comprendre les priorités des gouvernants. Ils s’interrogent sur le poids exponentiellement croissant du secteur privé, pointant un doigt accusateur vers certains barons du régime ou apparentés. Ils dénoncent l’usage systématique de la méthode forte, exigeant le respect de leur droit de grève. Ils soulignent le rôle de l’école dans la construction des nations, rappelant la constitutionnalité du droit à l’éducation.

Des fondements vermoulus

Et pourtant, rien dans ces revendications corporatistes n’échappe au commun des mortels. Autrement dit, la situation du monde de l’enseignement est connue de tous. Les états généraux de l’éducation de 1983 l’ont dit, ceux de 2010 l’ont redit, les études menées par différents organismes internationaux l’ont confirmé : la part du produit intérieur brut (PIB) consacrée à l’enseignement est en constante régression, très largement en deçà de la moyenne des pays de même niveau ; les redoublements et abandons sont exagérément élevés au primaire, les classes surchargées et les transitions vers l’enseignement supérieur particulièrement difficiles. En un mot comme en mille, tous les observateurs en conviennent : les fondements du système éducatif sont vermoulus. Ils font eau de toute part.

Les défis à relever sont ceux de la protection de la petite enfance, de la couverture de l’enseignement de base, de la réponse aux besoins éducatifs des jeunes et, de l’excellence du système éducatif. Concrètement, il faut améliorer les infrastructures, les équipements et, le matériel pédagogique. Il est aussi question de faciliter le recrutement et la formation des enseignants. Bien entendu, leur traitement salarial et leurs conditions de vie doivent aussi faire l’objet d’une attention particulière. Dans ce vaste chantier, la prise en compte des politiques connexes ou d’accompagnement se révèle être une nécessité. On pense au budget, à l’aménagement du territoire, à la famille, à l’émigration, à la recherche scientifique et surtout à la formation professionnelle. Pourtant connues de tous, ces pistes de solution vont-elles finalement être explorées ? Ou bien va-t-on poursuivre cette politique d’affrontement, paravent commode d’un ravalement de façade si nuisible à la construction de la nation ?

Jeu dangereux

Le gouvernement a récemment laissé entrevoir l’option choisie. Jouant sur le registre de la dilution des responsabilités, il a tenté de faire l’histoire à rebours. Usant de l’intimidation, il a annoncé devoir couper des têtes (lire «Crise à l’Education nationale: le gouvernement opte pour la fermeté»). Reste à vérifier si ces coupures de soldes permettront de lutter contre la marchandisation du savoir et la régression de l’efficacité pédagogique. De toute évidence, on peut présager du contraire. Reste à savoir si toutes ces menaces contribueront au désengorgement des salles de classe, à la fourniture de tables-bancs et à la facilitation de passerelles entre degrés, d’une part, et entre types d’enseignement, d’autre part. Manifestement, on peut en douter. Et si le gouvernement péchait simplement par un manque de méthode ? Et si des agendas cachés étaient au fondement de toutes ses décisions ?

L’épreuve de force n’est visiblement pas le meilleur moyen d’aborder la crise de l’enseignement. Bien au contraire, c’est un jeu dangereux. Le délitement de l’école publique crée le terreau sur lequel pauvreté chronique, insécurité permanente, incivisme généralisé et défiance politique globale pourraient émerger. Au-delà, une forme de poujadisme à la gabonaise pourrait apparaître, ouvrant la voie à un antirépublicanisme débridé. Et pour cause : dans le contexte socio-politique actuel, la crise de l’enseignement est d’abord le contrecoup d’une gouvernance hérétique. Elle est aussi la conséquence d’une faible adhésion des pouvoirs publics aux idéaux démocratiques. Les tractations préalables au dialogue national, annoncé avec tambours et trompettes, le prouvent : syndicats et acteurs non étatiques en sont les grands oubliés. Dans quelle instance peut-on aller aux sources des problèmes si ce n’est dans le cadre d’une concertation nationale ? Comment aborder des questions sensibles sans la participation des concernés ?

Rien, dans l’attitude du gouvernement, ne permet de répondre à ces questions. À ce jour, tout laisse croire à une banalisation des revendications des parties prenantes de l’enseignement. Du coup, la rue apparaît comme leur seul terrain d’expression et la grève leur unique mode d’action. Pour tout dire, le raidissement des syndicats de l’enseignement est facilité par l’incapacité du gouvernement à faire preuve de transparence et de responsabilité. Il est légitimé par le refus de leur accorder davantage de place dans la vie publique. La gouvernance actuelle semble privilégier l’opacité, l’exclusion et l’irresponsabilité. Or, la formulation et la mise en œuvre des politiques publiques commandent l’implication des parties prenantes. Faut-il le rappeler ? En tout cas, la réforme de notre système d’enseignement et la fin de nos guerres civiles froides passent par l’inclusion, la concertation ou la négociation. L’épreuve de force, la menace ou l’intimidation n’ont, par voie conséquence, pas droit de cité. Le gouvernement le comprendra-t-il un jour ?

 

 
GR
 

26 Commentaires

  1. Gilbert dit :

    L’épreuve de force, la menace ou l’intimidation n’ont, par voie conséquence, pas droit de cité. Le gouvernement le comprendra-t-il un jour ?

  2. diogene dit :

    Les populations instruites sont plus difficiles à manipuler. Depuis très longtemps, le système éducatif est réglé sur le mode destruction en douceur.
    Il est question de déformation plutôt que du contraire.
    Quoi de plus difficile que de redresser un fer tordu qui se croit rectiligne.
    Toutes les dictatures fonctionnent ainsi, une élite éduquée s’arroge la maitrise des troupeaux ignares.
    Le savoir est une arme. l’ignorance est une chaine.

  3. Nkembo dit :

    Quand une grève est politisée,il n’y a rien à négocier.Je crois que le gouvernement doit être ferme,si possible les radier et ils retrouveront leur fonction quand Ping sera Président de la république.

  4. AGORA dit :

    Le problème ne sera résolu que quand les revendications des enseignants seront réglés une bonne fois pour toutes. …comment? L’État Gabonais à de l’argent. …il suffit de voir tous ce qu’on a dépensé pour la Can,et nos futur dépense pour les autres futilités. Lavenir le la jeunesse est plus important que les jeux.Mais ce gouvernement, le comprend t-il?

  5. Le Tsombi dit :

    Il n’y a pas de bras de fer entre l’état et les syndicats de l’enseignement. comprenons nous bien c’est l’état qui met en place les politiques publiques en matière d’enseignement et de droit à l’éducation. comment alors comprendre que l’état peine à prendre en compte les problèmes des enseignants depuis 1990. Analysons cela: les problèmes sont et demeurent les mêmes pas assez de salles de classe (alors construisez), manque de matériel (alors achetez), manque de personnel (alors formez et mettez les moyens qui vont avec). vous formez des enseignants qui forcement ont des plans de carrières mais si cela n’est pas suivi ou va t-on? 50 ans après les indépendances c’est maintenant que l’on vient parler de suivi des carrières des agents de l’état. comme a dit un greffier au tribunal, tu rentres greffier et tu es sur de prendre la retraite en qualité de greffier. tu enseignant du primaire mais tu es sur de finir au primaire. ta seule évolution c’est que si tu as commencé à enseigner le CP1 tu finiras au CM2. le système de santé c’est pas la peine. tout le monde ne peut pas être agent de force de défense et/ou de securité… il n’ y a pas de bras de fer, il revient à l’état de jouer sa partition

    • christian222 dit :

      les problèmes de l’enseignements ne sont pas les seules!!!

      le probleme des salles par exemple, dans tous les départements ministériel il y a un pb de cadre de travail. dans l’administration centrale, il y a des directions générales qui manquent de tout! même avoir de l’encre est un problème! c’est une crise qui est globale!!!

      cependant, les enseignants reconnaissons le, abuse dans l’usage de la grève!!! c’est pas possible!!! ils ne font que cela…

      • LB dit :

        Ah bon…!?!

        Si les agents des autres ministeres ne revendiquent pas de meilleures conditions de travail, c est la faute a qui ? Ils ne veulent pas prendre leurs responsabilites.

        Les pbs et de fourniture de bureau ne date pas de la crise…vous mettez tout sur le dos de la crise alors que des budgets sont sortis chaque Annee.
        En 2015, on a du donner de la papeterie au commisariat de ma Ville pour faire avancer mes dossiers, alors qu Il y a une caisse pour ca !?!

        Et puis ceux ne font pas greve la, ils rendent quels services aux usagers. Ils sont souvent de mauvaise humeur, vous recoivent ou signent les papiers quand ils veulent. Le fonctionnaire qui se pointe a son poste a 11h et qui est paye avec nos impots.

        Mieux, l enseignant qui greve et qui ne fait pas semblant de travailler.

  6. christian222 dit :

    dans un rapport de force entre employeur et employé, chaque partie tient l’autre, et le conflit a des chances de souvent trouver une issue favorable. soit on s’entend ou on se se sépare.

    à l’éducation nationale, l’enseignant a le moyen de pression qui est l’arrêt des cours subi par les enfants. ce qui oblige le gouvernement à céder certaines choses lorsque la pression est à son maximum

    Mais le Gouvernement jusqu’aujourd’hui a eu quel moyen de pression sur les enseignants? les types touchent l’intégralité de leur salaire même s’ils font 6 mois à la maison! ils ne risquent pas de licenciement!

    comment voulez vous qu’on trouve une solution à ce problème? c’est pas possible!!!

    • LB dit :

      Legalement, peux t on radier ou licencier un fonctionnaire ou agent du prive, pour avoir exercer son droit de greve ?

      • christian222 dit :

        c’est pour cela que vous êtes tomber dans cet abus!!!

        vous estimez que vous êtes des intouchables! par conséquent vous pouvez rester chez vous indéfiniment et pointer chaque 25! trop facile!!!!

        si si, la loi prévoit de licencier au bout d’un certain temps même le fonctionnaire en cas d’absence totale!!!

        • LB dit :

          Ne vous contentez pas de dire au bout d un certain temps ? Et on licencie sans procedure, on coupe le salaire sans procedure ? Lol Meme dans le prive (societe bien structuree oh) ca ne se passe pas comme ca.

          En gros ces enseignants doivent se contenter d aller bosser en attendant que l Etat daigne regulariser leur situation. Lol

          Nous avons vous et moi que si ces enseignants reprennent le boulot, ils se feront carottes une nouvelle fois. L Etat tient rarement ses promesses.

      • Nkembo dit :

        oui la radiation des fonctionnaires qui ont abandonné leur poste est légale. Un ministre camerounais s’adressant aux grévistes vient de faire suivante: » Si vous voulez faire grève allez-y au Gabon,c’est là-bas qu’ on accepte toute sorte de grève. »
        si ça vous réjouit mais retenez que même à l’international on sait que les grèves au Gabon sont politisée.

  7. ans dit :

    je soutiens totalement la démarche du gouvernement!

    peu importe les raisons, on ne peut pas toucher intégralement son salaire si on a passer le mois à la maison!

    • Mboung dit :

      Ils vous montrent qu’ils sont prêts à sacrifier leurs salaires (auxquels visiblement Vs tenez mm + qu’eux sic !) vue l’importance de la cause et Vs insistez pr Vs enfoncer c’est bien la preuve que Vs Vs trompez d’ennemi (s ?) 7 (sept) années sans construire la moindre salle de classe à minima cela devrait vous interpeller sur comment ces gens font-ils pour absorber de tels flux ??? Comment ces gens font-ils pour gérer physiquement des ratios de 120, 150 , parfois 200 et + élèves avec non pas les mm nombres de tables bancs mais beaucoup moins car il est a prévoir à minima 10% du mobilier scolaire dispo se détériore de façon irréversible chaque année. Imaginez seulement le constat 7ans après sans renouvèlement. Au lieu de venir les invectivez demandez-vous à quoi cela ressemblerait si non armés de leur ferme volonté de faire leur job ils (les enseignants tous confondus en niveau)venaient feindre dispenser leurs cours et partir c’est tt à fait possible Si Vs faisiez 7 effort Vs seriez effaré par l’état de dénuement dans lequel se débattent nombre d’entre eux (je Vs épargne les détails sur les établissements de l’intérieur du pays sic !) qui veulent résister à la corruption, la prévarication, les malversations, les passe droits qui étouffent dans l’œuf tte initiative honnête.Les traiter comme ce pouvoir et ses gouvernements les traite c’est vraiment le coup de pied de l’âne

      Le moins coûteux de tous les vices, c’est l’ingratitude. Jean Louis Auguste Commerson

  8. Toto dit :

    C’est dommage de voir à quel point on détruit l’école au Gabon. Ces gens qui nous forment sont pour la plupart des amoureux de leur métier mais ils sont traités comme des moins que rien.

    • Patrick_km dit :

      désolé… tous ne le sont plus!!!

      Une majorité restent noble! amoureux de son métier et fort heureusement.

      MAIS, on ne va pas avoir peur de le dire,certains comme dans tous les corps du monde sont devenus politiciens, d’autres de grands paresseux et enfin une catégorie qui ne parle que argent!!! rien d’autre. c’est aussi la vérité!!!!

  9. MA HONTE dit :

    MA HONTE se réjouit toujours lorsqu’elle lit des articles écrits avec impartialité er rigueur intellectuelle. Bravo Roxanne.
    En ce qui vous concerne, vous, les responsables politiques de notre pays,
    sachez une bonne fois pour pour toute que c’est à vous de servir le peuple et non le contraire. La création prémédité et planifié de plusieurs générations de personne mal éduquées et formées ne pourra que nous laisser dans les méandres de ignorance et de la pauvreté à tous les niveaux, si tant est que nous savons réellement ce qu’est la Mondialisation et les enjeux qu’Elle implique.

  10. Jean - Jacques dit :

    Sur cette plateforme certains voyous passent leur temps à m’insulter.

    Notre systeme educatif est devenu de plus en plus dichotomique, soit on reussit, soit on échoue ou on abandonne.

    Tout simplement on a des soit disant enseignants qui ont preter serment pour transmettre la connnaissance et le savoir, pour eux c’est la politique, comme Bitouga etait devenu ministre donc chaque leader du syndicat rêve qu’il peut aussi devenir ministre.

    Le pays comme le Gabon on doit suppreimer le droit de greves, couper les salaires des grevistes, un pays comme la Corée du Nord le taux d’alphabetisation est de 100%. sachant que la Corée du Nord les petit singe fou que les opposants, syndicalistes font au Gabon en Corée c’est la mort ou la prison avis.

    Le Top 20 les pays qui ont un systeme educatif performant au Monde :

    Top 20 des pays au système éducatif le plus performant, selon l’étude PISA 2016
    1. Singapour (573 points)
    2. Hong Kong (561 pts)
    3. Taiwan (560 pts)
    4. Corée (554 pts)
    5. Macao (538 pts)
    6. Japon (536 pts)
    7. Liechtenstein (535 pts)
    8. Suisse (531 pts)
    9. Pays-Bas (523 pts)
    10. Estonie (521 pts)
    11. Finlande (519 pts)
    12. Canada (518 pts)
    13. Pologne (518 pts)
    14. Belgique (515 pts)
    15. Allemagne (514 pts)
    16. Vietnam (511 pts)
    17. Autriche (506 pts)
    18. Australie (506 pts)
    19. Irlande (501 pts)
    20. Slovénie (501 pts)
    … 24. France (495 pts)

    Or certains instissent moins que les USA qui malgré les moyens collosaux que le gouvernmenet americain injecte à l’éducation , mais les USA ne figurent pas dans le top 20.

    Avant de reclarer du gouvernement vous enseignants vous faites quoi? quel est votre rendement? vous avez que les droits et vous n’avez pas le devoir?

    D’où la phrase de madame Irina Bokova : « L’éducation doit faire plus que transmettre des informations et du savoir » de l’unesco.

    Mais c’est d’hommage quand les enseignants se transforment à des milices dans un pays. c’est le chao total , il faut les sanctions dures pour mettre de l’ordre.

  11. Jean - Jacques dit :

    Nelson Mnadela avait dit:<>, Or au Gabon les enseignats et opposants ont un seul objectif sabotter l’avenir des enfants des autres.En oubliant que la premiere richesse d’une Nation c’est sa population. et quand elle est bien éduquer on developpe le pays par ce que les intelligences vont reflechirent positivement et non pour allez casser la voiture du pdgiste, de la famille Bongo, ou d’insulter un journalité par ce qu’il aurait publier une information contre les opposant voyou.Sans l’éducation on aura les citoyens qui accepteront de prendre 500 de l’opposant perdant pour aller bruler la maison d’un pdgiste,voler la boulagerie d’un libanais qui aurait refuser un opposant le bon d’un kilo de cotisse, par ce dernier. nous voulons les enseignants responsables, eleves, etudiants, parents, policiers, gouvernements tous un seul objectif le futur de nos enfants, citoyens, et du pays. que les agents revendiquent de maniere responsable, dialogue avec les autorités qui sont aussi les parents des enfants, les enseignats, des policiers.il n’y pas de probleme sans solution. on peut faire greve en travaillant. ( une commission qui est responsable pour le suivi) des revendications.

  12. howard dit :

    Le fou ne sais pas qil est fou tes delires m laissent penser qe tu n vit pas au gabon mais dans la brousse de l.amazonie laba g crois tu as juste eu un ptit signale du nette sur ton fone et tu as pondu ce caca que tu n.as pas relu moufff chaches toi mon cher regarde les autres postes plus haut pour t.en informer tu fais du sur place

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