La société de production de ciment du Gabon est en proie à d’inquiétantes difficultés. Alors que son usine de Ntoum est en quasi-fermeture, celle d’Owendo est en passe de connaître le même sort. Le ministère en charge du Commerce et de l’Industrie devrait regarder de plus près ce secteur nécessitant, de l’avis des travailleurs, la régulation de l’importation du ciment au Gabon.

Le président Ali Bongo, le 9 juin 2016, lors de l’inauguration de la nouvelle usine de Cimaf Gabon.
© presidengeGA

 

Le ciment importé de l’étranger va-t-il tuer CimGabon ? N’y a-t-il pas nécessité de mettre en place des mécanismes de protectionnisme économique ? Réunis en assemblée générale à la fin de la semaine dernière, les agents de CimGabon membres du Syndicat national des travailleurs des carrières (Synatrac), répondraient par l’affirmative à ces questions. Ils ont , à cet effet, appelé le gouvernement à prendre des mesures visant la régulation de l’importation du ciment étranger, notamment du Cameroun, de l’Europe de l’Est et d’Asie.

CimGabon va mourir si…

Edgard Gervais Obiang, le secrétaire général du Synatrac, a donc lancé un appel, particulièrement pressant aux pouvoirs publics, à trouver les voies et moyens devant permettre de maintenir l’entreprise et sauvegarder les centaines d’emplois de cette structure industrielle. «Pour nous, a-t-il souligné, si on continue d’importer le ciment de l’étranger sans tenir compte d’un certain nombre de facteurs, CimGabon va mourir».  On doit comprendre qu’au quotidien, l’entreprise industrielle vit mal l’importation massive du ciment étranger, sans qu’aucune disposition ne soit prise pour «protéger» la production locale. Des centaines d’emplois pouvant ainsi être amenés à disparaître.

Ancienne filiale du groupe norvégien Heidelberg, CimGabon a cédé, en mai 2014, la totalité de ses parts, soit 75% du capital de l’entreprise, au groupe marocain Cimaf. Malgré des initiatives managériales destinées à booster les ventes et à étendre sa présence sur le marché local, le cimentier gabonais a enregistré, entre 2012 et 2013, des pertes financières  chiffrées à 10,8 milliards de francs CFA. «CimGabon a connu une concurrence effrénée, avec l’amplification des entrées massives de ciment importé, qui ont fait perdre 72% des parts du marché local», indiquait, en mai 2014, Khalid Iben Khayat, directeur de Cimaf.

Mécanismes de «régulation» : un euphémisme pour dire «protectionnisme économique»

Si les salaires sont encore payés à CimGabon, la situation n’en a plus pour longtemps. «A notre niveau, nous avons, en décembre dernier, convaincu l’employeur de tout faire pour nous payer les salaires jusqu’en mars, et cela a été fait, la direction nous a payé jusqu’en mars 2017 ; à partir de ce mois d’avril, si l’État ne fait rien, si rien n’est fait, nous allons rejoindre le lot des employés qui ne sont pas payés par leur entreprise». 

La principale cimenterie du pays, considéré durant un bon moment comme l’un des fleurons de l’industrie du pays, fait donc face à une concurrence, jugée déloyale, des importateurs du ciment étranger qui le revendent 10 à 15 % moins cher que celui de l’entreprise locale. Il y a que CimGabon étant en incapacité de satisfaire la demande nationale, le Gabon avait décidé de libéraliser le marché du ciment, en vue de mettre fin à la pénurie de ciment sur son marché. Aujourd’hui, les employés souhaitent la mise en place de mécanismes de «régulation» du secteur – seuls susceptibles de préserver l’entreprise et ses emplois. On devrait le comprendre : le mot «régulation» est employé pour ne pas dire «protectionnisme économique». Le ministère de l’Industrie et celui de l’Économie ont, là, un dossier à regarder d’un peu plus près…

 

 
GR
 

7 Commentaires

  1. TCJ dit :

    Les Ciments du Gabon ne sont pas compétitifs au niveau des prix de vente, sachant qu’ils sont produits localement.
    Que dire lorsque les coûts de production des ciments importés sont plus bas.
    En réalité au Gabon, le problème est systémique.
    Il ne s’agit pas d’une ou quelques entreprises qui ne sont pas compétitives, mais plutôt du coût de la vie qu’il faut revoir à la baisse.
    L’État doit donc revoir ses priorités en mettant en place des politiques qui favorisent l’entrepreneuriat local évoluant dans le secteur secondaire. C’est en produisant local que les prix de vente peuvent être revus à la baisse.
    Par ailleurs, l’augmentation exponentielle des impôts et taxes, le train de vie dispendieux de l’État, le manque criard des voies de communications et la corruption qui gangrène tous les pans de l’administration voir de la société, sont autant de facteurs qui ont un impact significatif sur la fixation des prix de vente des produits au Gabon. Ils sont les freins à l’entrepreneuriat, au développement, à l’augmentation du pouvoir d’achat des entreprises et des ménages.
    Le Président de la République ne pourra pas bloquer les importations de ciment au regard du manque de compétitivité de CimGabon.
    Une telle action aura pour conséquence immédiate la pénurie et une baisse des taxes des ciments importés.
    En conséquence, il faut repenser le modèle socioéconomique gabonais dans sa globalité pour espérer des lendemains meilleurs.

  2. natty dread dit :

    on ne fait que payer les revers de notre culture, on a toujours préféré ce qui vient de l’étranger, maintenant que l’on se rend compte que c’est tendancieux…on fait comment?

  3. mohla dit :

    cimgabon ne peut pas parler de concurrence qu’il faut réguler.comment un sac de ciment produit au Gabon peut couter plus chère que celui qui vient du Cameroun?? les gabonais choisissent le meilleur prix,donc si cimgabon veut être compétitif,ils doivent revoir leur politique en matière de prix!!!

  4. Ange BOUSSAMBA dit :

    Ne laissez pas CimGabon mourir. Sauvez les emplois, Messieurs du Gouvernement !

  5. Ange BOUSSAMBA dit :

    Les employés sollicitent quelque chose de tout à fait compréhensible : la mise en place de la régulation du secteur. Est-ce si difficile ?

  6. Ch@rles LEGR@AND dit :

    Molah je partage votre avis et peux enrichir en disant que cimgabon n’ayant pas de concurrence locale n’arrive meme pas a obtenir une véritable production en la matière qui ferait confiance à une entreprise qui valorise meme pas son secteur promotionnel? Je passais seulement!

  7. Demain un jour nouveau dit :

    Bonjour à tous.
    Tous vos arguments de tiennent, le débat sur la mise en place de mesures de régulation. ..de mesures protectionnistes est d’actualité dans le monde entier. Il suffit de suivre la campagne présidentielle française pour s’en rendre compte.
    Je pense pour moi, à mon humble avis, que l’erreur qu’ a commise le gouvernement a été de libéraliser à tout va notre marché. Déjà nous ne produisons pas localment grand chose. Alors il aurait été préférable de protéger dans un 1er temps le peu d’entreprise qui existaient chez nous. Mais de quelles manières me diriez vous?Il faut repartir en amont : quelle était l’origine de l’ouverture de notre marché à la libre importation des ciments étrangers?
    Les nombreuses pénuries qui subiraientune inflation et une contrebande du ciment étranger.
    Quelle aurait pu être la solution?
    Pour moi l’état aurait dû autoriser une ouverture temporaire du marché. Ex: cimgabon prévoit produire chaque 60 000 tonnes de ciment or le marché à besoin de 120 000 tonnes. Alors on fixe un quota annuelle autorisant les importateurs a ne faire rentrer sur le territoire que les quantités jugées nécessaires.
    Comment aurions nous réguler l’importation des 60 000 T? En instituant une bourse. L’état imposerait que 60% des importateurs soit gabonais (Clause de Préférence nationale qui devrait regir tous les marches publiques). Les importateurs y viendraient soumettre leurs offres. Une licence quantitative d’importation serait délivrée à chaque importateur.
    De cette manière, On protège les emplois de la CIMGABON, on régule le prix plus qu’on stabilise l’offre, on permet à CIMGABON d’accroître progressivement sa production. Et On nationalise d’une certaine façon ce pan de l’économie.

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