Le Rassemblement pour le Gabon (RPG) va devoir se choisir un autre leader lors d’un Congrès devant être organisé en septembre-octobre prochain. Paul Mba Abessole, 78 ans cette année, leader charismatique de cette formation politique, a décidé de se retirer de la vie publique dans les prochaines semaines.
Paul Mba Abessole, à l’époque du béret révolutionnaire. © D.R.
 
Il avait entamé sa croisade contre le régime PDG en 1973, à 34 ans, alors qu’il officiait comme prêtre à Makokou. Pendant près de 45 ans, l’ancien prêtre a mené le combat pour une démocratisation des institutions et de la société gabonaises. Entre 1981 et 1989, en France, où il résidait dès son départ du Gabon, il a porté haut les activités du Mouvement de redressement national (Moréna), le parti clandestin créé par Simon Oyono Aba’a, Jean-Baptiste Obiang Etoughé, Moubamba Nziengui, Thomas Didyme Nzé, Paul Calvin Tomo, Nguéma Mintoghé, l’Abbé Noël Ngoua et quelques autres. Il était alors soutenu dans l’hexagone par Adrien Nguémah Ondo, Max Anicet Koumba et André Mba Obame, notamment.
Son retour au Gabon en 1989 brouilla son image. Nombreux parmi ses amis prirent leurs distances avec lui. Mais il poursuivit son combat. Qui ne se souvient de ses meetings à la mairie du 5ème arrondissement de Libreville, à celle du 6ème arrondissement, à Nkembo et ailleurs ? Des rencontres alors caractérisées par la présence massive de ses compatriotes. Paul Mba Abessole est le premier leader politique à avoir rempli des espaces publics à chacune de ses rencontres politiques. Il était adulé par les foules. Au fil de son cheminement politique, sa formation politique a changé de nom. C’est ainsi qu’en 1992, le Moréna des Bûcherons devint le Rassemblement national des bûcherons (RNB), puis, après son divorce d’avec Pierre-André Kombila, ce parti prit la dénomination de RNB-Nouveau Départ avant de s’appeler – après une décision de justice lui interdisant d’agir au nom du RNB –  le Rassemblement pour le Gabon (RPG).
Paul Mba Abessole. © D.R.
La Fête des Cultures
Paul Mba Abessole a connu quelques victoires, de grandes victoires, comme celle de la mairie de Libreville conquise de haute lutte en décembre 1996 face à un Parti démocratique gabonais (PDG) qui n’entendait pas se laisser tondre la laine sur le dos. Il contrôlera alors l’hôtel de ville et quatre des six arrondissements de la capitale gabonaise. Parmi les innovations qu’il apporta en tant qu’édile de Libreville, la plus emblématique fut la Fête des Cultures, un très beau rendez-vous des cultures du Gabon et de celles des communautés étrangères installées dans la capitale gabonaise. Il fut également élu député du 2ème  arrondissement de Libreville en 2001, avant d’aller se présenter dans sa ville natale d’Ayem-Agoula (3ème siège du département du Komo-Kango) et de gagner, en 2011, lors des dernières législatives.
Il intégra la majorité en 2003, et son parti n’en retira pas de grands profits. Au contraire, son image commença à se déliter à travers le pays en raison de cette alliance que certains de ses compagnons considérèrent comme «le mariage de la carpe et du lapin». En dehors de quelques strapontins ministériels, le RPG n’a pas eu l’alliance électorale qu’il était alors en droit d’avoir sur une répartition des sièges électoraux lors de scrutins législatifs, par exemple. Le RPG n’avait tout juste qu’à ne pas présenter de candidat aux élections présidentielles et à apporter au candidat du PDG tous ses «bœufs votants», son patrimoine humain et électoral. En son for intérieur, Paul Mba Abessole qui a voulu être  «un homme de la synthèse» (dans un système multipartite naissant) sait que cette alliance aura cassé son parti, le faisant passer de «parti-éléphant»  à  «parti gazelle» !
Paul Mba Abessole (pantalon blanc), avec d’autres leaders de l’opposition. © D.R.
Beaucoup d’amitiés rompues, beaucoup de divorces
Paul Mba Abessole aura connu beaucoup de divorces politiques, dont celui d’avec le Professeur de Cardiologie, Pierre-André Kombila, a été le plus retentissant, tant nul ne pouvait prévoir une telle séparation après une amitié humaine de plus de trente années et un cheminement politique de plus de vingt ans. Vincent Mouleingui Boukosso, Pierre Amoughé Mba, Marguerite Virginius Makaga, Vincent Essono Mengué, Clément Ndong Mba, Rose Allogo Mengara, Métimbé Fady, Mbéné Mayer, Eulalie Nkweigne, Benoît Nzé Mba et Béni Ngoua Mbina quittèrent eux aussi le parti.
45 ans de combat pour faire du Gabon un pays démocratique, 45 ans pour permettre la libre expression et la liberté d’opinion, voilà ce qu’a été son objectif. Le «vainqueur présumé» de l’élection présidentielle de 1993 a-t-il atteint cet objectif ? Clairement non. Dans l’une de ses sorties médiatiques il y a quelques mois, le Père Paul Mba Abessole a en effet affirmé que «le Gabon était aujourd’hui pire que la Corée du Nord» ! Il avait qualifié son appartenance à la majorité de groupe «majorité façon-façon».
© D.R.
L’homme de la synthèse ?
Le président du RPG achève en juillet prochain son mandat de député du département du Komo-Kango (3ème siège). Il occupe actuellement au sein de l’Assemblée nationale les fonctions de 5ème vice-président de l’institution. Pour lui succéder, beaucoup lui suggèrent soit le vice-président actuel de sa formation, Jean-Nestor Nguema Mebane, soit un de ses Conseillers politiques, Raymond Placide Ndong Meyo. D’autres suggèrent que le RNB de Pierre-André Kombila et le RPG fusionnent pour créer une formation moins squelettique, le RNB-RPG ! Que gardera-t-on de Mba Abessole ? Un homme de la synthèse, comme le montre son rapprochement avec Omar Bongo, même si cela a causé le délitement de son parti ? Un homme qui prôna le pardon, avec sa logogénèse, pour les (anciens) dirigeants du pays, afin que ceux-ci n’aient pas peur de perdre leurs positions et leurs privilèges ? Que retiendra-t-on de cet homme ? Le mysticisme de l’homme aux missiles Kappa ou sa tendance à travailler avec ses adversaires pour le développement du Gabon ? Que retiendra-t-on de cet homme pas sectaire, mais trop ouvert à tous les vents ? L’histoire le dira.
 

 
GR
 

0 Commentaires

  1. ebouboua dit :

    Il faut savoir quitter les choses avant qu’elles ne te quittent Bien joué mon père

  2. Matho dit :

    Homme politique pas toujours facile à suivre mais une sortie digne, propre et exemplaire. Il est temps de penser à vous, « padre » bon repos!
    Vous aussi,Ayem Agoula n’est pas une ville tout de même!

  3. J3ff dit :

    LA PLUS BELLE ARNAQUE DE LA POLITIQUE GABONAISE ! On n’avait vraiment cru qu’enfin nous avions là un vrai opposant au pouvoir Bongo au Gabon . En fait il était entrain de nous la mettre sans douleur pendant que nous dormions du sommeil de notre naïveté.A notre réveil,il était déjà membre de la majorité présidentielle . On s’est vraiment senti violé !

  4. tara dit :

    Bonne décision , très courageuse c’est très rare au Gabon où les présidents de parti meurent sans laisser d’héritier politique ou autre.
    Lorsque les personnes sont partis on dit souvent du bien d’elles mais vs vs êtes encore là alors félicitation papy, j’espère que vos statuts prévoient une succession sans faille.

  5. NGOUKOUNI WEDEY dit :

    Tu as été et restera le leader politique Gabonais. Que l’Éternel t’accompagne.

  6. jean -jacques dit :

    Voila un vrai sage, qui se que l’age est important et à plus de 65 ans la memoire ne fonctionne plus bien, MYBOTO, NZOUBA, JACKY, ET PING FAITES LA MÊME CHOSE LAISSER LA POLITIQUE,

  7. Kenoh dit :

    Arrêtez il a entubé tous le monde dis donc.

  8. jean -jacques dit :

    il faut radier tous les enseigants grevistes. les noms doivent disparaitre du fichier de la fonction publique.

  9. Félix Ayenet dit :

    C’est bien que de dire qu’il se retire de la tête de son parti. Mais il laisse quoi à ses successeurs ? Son machin de RPG n’est plus que l’ombre de lui même. C’est comme qui dirait « l’héritage de Rantanplan »

  10. Ange BOUSSAMBA dit :

    Félicitations au Père Paul pour cette décision. Il va passer la main à une nouvelle génération pour régénérer le RPG. Bravo §

  11. JUSTICE dit :

    Pourquoi partir maintenant? Il est fatigué ou c’est encore une estocade? Un coup de bleuf pour réapparaître avec la prochaine majorité présidentielle, pour jouer les trouble fêtes? Ecole cadeau; Hôpital cadeau »…on abandonne? Triste Gabon en mal de leaders charismatiques!

  12. IPANDY dit :

    Je tiens à saluer la plume de GERALD MOUNOMBY pour cet article. En le lisant, j’ai eu l’impression d’avoir vécu ses 45 ans de combat près de ce grand homme qui est MBA DES BOIS.
    J’avais condamné à l’époque son ralliement à la majorité de la galaxi BONGO. J’ai condamné son attitude en 2009, après le coup d’état électoral. Aujourd’hui en lisant cet article j’ai coulé une larme car, je pense que la retraite politique d’un homme de cet envergure est semblable à son décès spirituel.
    Je respecte néanmoins cette sage décision et je me joins aux autres pour lui dire  » félicitation pour la longévité et surtout pour la contribution à la construction du pays »

  13. J3ff dit :

    Quand je lis tous ces posts qui soulignent la sagesse de la décision de cet homme à fermer la dernière page de son histoire politique,je comprends mieux pourquoi le peuple gabonais est cocufié par ses dirigeants politiques depuis l’indépendance .le peuple gabonais est naïf.M’ba Abessole ne se retire pas de la politique parce qu’il estime qu’il a fait son temps.il se retire parce qu’il n’a plus de perspectives,il n’a plus d’avenir en politique au Gabon .politiquement il ne pèse plus rien.ni par la taille de son parti(micro parti)ni par son influence(ce qu’il peut peser en cas d’alliance).Depuis 5 ans ,il existait en politique plus par le poids symbolique que lui conférait son passé que par une assise représentative sur le terrain dans l’ensemble du territoire .Depuis la mise en route du nouveau mandat d’Ali dont il a refusé de soutenir la candidature (certainement parce que le ventripotent conscient que le vieux n’a plus de poids politique,il a refusé de s’aligner sur ses vœux)il a désormais l’horizon bouché du côté de la majorité .Et ducôté de l’opposition dont il a depuis longtemps trahi les idéaux,il n’a pas d’horizon non plus .Et son parti devenu insignifiant ne peut exister de lui-même sur la scène politique nationale. il lui restait quoi comme perspective ? entre dilapider le pactole qu’il a reçu des Bongo père & fils par acheter des ralliements à coup de dizaines de millions(c’est la pratique)et arrêter les frais et profiter de cet argent tranquillement jusqu’à la fin de ses jours,il a choisi la 2ème option .
    ARRÊTEZ D’ÊTRE NAÏFS.SA DECISION DE RELEVE PAS DE LA SAGESSE , MAIS DU PRAGMATISME,Point !

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